[crowdfunding] «Nous sommes là pour les paysans»

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[crowdfunding] «Nous sommes là pour les paysans»

Projets non bio s’abstenir. Bluebees choisit clairement ses porteurs de projet en fonction d’une ligne. Le don représente 1/ 3 des projets. La plate-forme s’oriente de plus en plus vers l’equity et le crowdlending.

Créée fin 2012 par Maxime de Rostolan (Fermes d’avenir), la plate-forme Bluebees visait à promouvoir le micro-crédit pour les fermes en Afrique et les projets à vocation alimentaire. En 2014, le monopole bancaire saute et les opérations de crédit s’ouvrent aux particuliers épargnants, à hauteur de 1.000€ pour les personnes physiques. Pour la plate-forme, l’activité de prêt représente 70% en valeur  pour 1/3 des projets.

Emmanuelle Paillat, directrice opératio

Emmanuelle Paillat, directrice opérationnelle de BlueBees, est spécialisée dans l’analyse financière et le contrôle de gestion. Auparavant, elle a travaillé comme responsable de la comptabilité environnementale chez Nature et Découvertes.

Son credo: l’agro-écologie, Pierre Rabhi, la création d’emploi et de lien social. «On est plutôt sur des petites fermes engagées sur le plan écologique.»

Quels sont les principaux critères auxquels doivent répondre les porteurs des projets?

Être en bio ou en cours de conversion. Avoir un projet local. Un projet sur deux est refusé. Beaucoup ne tiennent pas la route. Si pas écologique: je ne prends pas; si pas connecté: pareil. Celui qui ne répond pas au téléphone ou à ses mails ne pourra pas être en mesure de suivre la campagne de financement. On identifie tout de suite les signaux faibles, ceux qui rêvent leur vie, et on se plante beaucoup moins qu’avant. Les questions économiques permettent de faire le tri. Les mauvais gestionnaires, je n’en veux pas. Ça dessert énormément la plate-forme. Comme cela il n’y a pas de déçus.

Exemple de projet : https://bluebees.fr/fr/project/267-au-coin-des-producteurs

Exemple de projet : https://bluebees.fr/fr/project/267-au-coin-des-producteurs

Attendez-vous que les porteurs de projets vous contactent ou allez-vous à leur rencontre? Comment procédez-vous?

L’idée n’est pas d’avoir du volume mais des projets plus importants financièrement et qui réussissent. On effectue beaucoup de sourcing pour repérer les projets qui nous intéressent. A l’affût de la ferme innovante, nous parcourons la presse généraliste et agricole, les actualités spécialisées, nous allons sur les blogs, les réseaux sociaux.

Il y a aussi des gens qui nous contactent. C’est même arrivé que quelqu’un nous contacte juste parce que Miimosa comptait parmi ses partenaires les OPA classique (JA, chambre d’agriculture).

Nous organisons également des concours, comme des appels à projets. Nous avons par exemple proposé un concours «Je deviens paysan», pour permettre 10 installations avec des prêts à taux zéro. Plus récemment, nous avons fait un concours «Arbre d’avenir» pour encourager l’agroforesterie. Sur les 34 lauréats, les trois meilleurs auront une campagne de crowdfunding. De manière générale, nous touchons plutôt les néo-ruraux. 

 

CaptureConcours FermeAvenir

Concours fermes d’avenir https://bluebees.fr/fr/concours2016

 

Proposez-vous un accompagnement à la mise en ligne du projet (communication, aide à la rédaction, etc.)? Ces services sont-ils payants? Si oui, combien?

Les services sont gratuits. Pour les dons, nous échangeons par téléphone et par mail, c’est plus rare que l’on rencontre les personnes La présentation du projet visuelle et rédactionnelle doit être relativement prête. Nous pouvons donner des conseils en amont du lancement de la campagne. Nous assurons également le mailing pour les médias et sur notre réseau. Parfois même des flyers si nous participons à des manifestations. Chaque projet a au moins un post Facebook. Par ailleurs, nous envoyons à nos contributeurs une newsletter toutes les trois semaines avec les projets du moment.

Chez Blueebees, nous cultivons l’idée d’image et d’appartenance. Sur chaque campagne, la plate-forme apporte environ 30% du montant du don avec des gens déjà identifiés sur le site (qui ont déjà donné, NDLR).

Pratiquez-vous le don, le prêt ou les deux? Quelle en est la valeur moyenne? A combien s’élèvent les projets en moyenne selon ces deux catégories?

Nous pratiquons les deux. Pour le crowdfunding, la valeur moyenne des contributions est de 68€ pour des campagnes autour de 8600€. Pour le crowdlending, les gens prêtent en moyenne 268€ (284€ en 2016) pour des campagnes autour de 84.000€. En valeur on a plus de prêt (70%) mais en nombre, on a plus de dons (2/3 des projets).

Comment se rémunère votre plate-forme?

8% pour les dons (TTC) et 5% pour les prêts sur les sommes levées par le porteur de projet.

 

Capturebluebees

Quels sont les frais à la charge du porteur de projet?

Sa communication en est une grosse partie. Sans oublier le temps. Le porteur de projets a ensuite souvent les clés en main pour défendre son projet dans les médias et animer ses réseaux sociaux et les différents vecteurs médias. Si la mayonnaise prend, il devra aussi prendre le temps de répondre aux éventuels contributeurs qui se posent des questions, à des interviews, etc.

Comment vérifiez/garantissez-vous que les fonds sont bien utilisés ?

C’est impossible de véritablement vérifier une fois que le porteur de projet a récupéré son argent . Néanmoins, avec la sélection en amont, nous tombons sur des personnes sincères. Je ne crois pas que l’argent ait servi à partir aux Bahamas.

11.051 comptes de contributeurs sur la plate-forme. Quelles relations entretenez-vous?

Nos contributeurs reçoivent une newsletter toutes les trois semaines. Ils ne doivent surtout pas être mécontents et le porteur de projet doit participer à cet élan collectif en donnant des nouvelles régulièrement une fois la campagne terminée. Il y a l’idée de fédérer un réseau autour de soi, réseau virtuel mais actif qui participe aussi à l’image de l’agriculteur.

Combien de salariés travaillent sur la plate-forme? Bénéficiez-vous de l’appui logistique de l’un de vos actionnaires?

Pour l’instant, nous sommes deux et espérons être à l’équilibre financièrement en 2017. Nature et Découverte nous apporte un appui logistique pour les bureaux, la comptabilité.

 

Bluebees : pour en savoir plus

Les actionnaires
• Nature et Découverte (24 % ): entreprise familiale. Les magasins Nature et Découverte distribuent des produits de loisirs extérieurs et de bien-être.
• Le Groupe SOS (51%). Construit sur des activités de lutte contre les exclusions, le Groupe SOS répond aux enjeux sociaux à travers 5 secteurs: la jeunesse, l’emploi, les solidarités, la santé et les seniors. Avec 15.000 salariés et 405 établissements et services, il constitue la première entreprise sociale européenne.
• Terre et humanisme. Créée en 1994 sous le nom des “Amis de Pierre Rabhi”, rebaptisée en 1999, l’association Terre et Humanisme œuvre pour la transmission de l’agro-écologie comme pratique et éthique visant l’amélioration de la condition de l’être humain et de son environnement naturel.
• Terre de liens. Réseau associatif mobilisé partout en France, il accueille et accompagne les paysans pour leur accès à la terre, informe et rassemble le public autour des enjeux fonciers et agricoles. Le mouvement comprend également une foncière pour gérer les terres et une fondation.
Quelques chiffres
• Pourcentage de projets agricoles 100 % plate-forme dédiée
• Dons récoltés en 2015: 160.000 euros sur 12 projets en 2015 en France (6 au «Sud»)
• Taux de succès: 65% en 2015 et vise le 100% en 2016

Retrouvez les interviews des autres responsables de plateformes de crowdfunding investies dans le monde agricole:

Miimosa: « une plateforme pour toutes les agricultures, ‘sans clivages' »

Artisans, commerçants, agriculteurs: BulbInTown, la plateforme du « faire local »

KissKissBankBank et ses « mentors »

Fundovino: même en cas d’échec, la visibilité au rendez-vous

ainsi que tous les compléments à notre dossier de novembre 2016: « Crowdfunding, ça décolle! »

Mensuel novembre 2016