Produire moins mais gagner plus

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Produire moins mais gagner plus

Emmanuel Roux actionne tous les leviers à sa disposition pour rendre son troupeau autonome sur le plan alimentaire.

Comment atteindre l’autonomie alimentaire de son troupeau et réduire les coûts de production en conservant des marges ? Rencontre à la ferme de l’Etang chez Emmanuel Roux.

A Sigoulès, en Bergeracois, Emmanuel Roux exploite 15 hectares de vignoble auxquels s’ajoutent 100 ha de cultures diverses. Celles-ci sont destinées à l’alimentation du troupeau des 60 vaches laitières qui produisent les quelque 300000 litres de lait bio, commercialisé auprès de Biolait.

Une gestion rigoureusement réfléchie et des méthodes de travail bien rodées lui permettent d’atteindre quasiment l’autonomie alimentaire du troupeau. « Mon objectif, c’est de ne pas avoir la venue de camions de livraison d’aliments pour nourrir mon troupeau. Cependant, ce n’est pas encore du 100% car je demeure obligé (pour le moment) de me fournir en tourteaux de soja bio, assez coûteux. »

L’un des premiers postes est la mise en adéquation du nombre d’animaux avec la capacité des bâtiments et la production de nourriture. « L’idéal dans mon cas serait 50 vaches laitières. J’en ai 60 et c’est juste, surtout en terme de bâtiments. » Avec le DAC, les animaux reçoivent une ration de complément équilibrée, pour les autres aliments, le libre-service favorise les plus gourmandes un peu au détriment des plus timides. «L’installation d’un cornadis et une distribution à l’aide d’une mélangeuse seraient plus appropriées mais ce serait aussi plus d’investissement et plus de travail.»

Cultiver autrement

Autre option, adapter les pratiques culturales. Limiter autant que faire se peut les passages d’engins coûteux et gourmands en carburant… « L’adhésion aux cuma du Besajou, de La Forêt et de Bouniague, selon les matériels nécessaires, est un avantage certain avec des coûts supportables. » Chez Emmanuel, plus de labour mais des TCS (techniques culturales simplifiées), soit déchaumage et semis direct. Une utilisation maximale du fumier, semi-composté en bord de champs, avant d’être épandu le plus tôt possible, pour une bonne imprégnation, l’exempte d’achat d’engrais. Il insiste sur l’importance de certains travaux, épandage ou récolte, très tôt dans la saison. Pour faire face de son mieux à la mauvaise portance des sols, les engins utilisés sont équipés de pneus basse pression.

Quarante hectares sont consacrés à la luzerne et au trèfle violet, après préfanage et ensilage précoce de printemps, la seconde coupe sera récoltée en foin. Puis, à l’automne, les parcelles moins productives seront sur-semées en méteil ce qui en augmentera la richesse. Même cultivés individuellement, blé, épeautre, avoine, fèveroles, pois et vesses seront mélangés dans la cellule de stockage et aplatis au concasseur avant d’être consommés.

A plus ou moins long terme, d’autres leviers peuvent être activés. Un travail sur la génétique pourrait peut-être conduire à s’affranchir du soja. Emmanuel teste des croisements Montbéliardes/Jersiaises, races très productives en matière grasse et protéique. Autre piste, se passer des services onéreux d’intervenants extérieurs, comme l’insémination grâce à la présence d’un taureau ou ceux du contrôle laitier. « Le comptage cellulaire me permet cependant de réserver le lait des animaux à cellules pour l’alimentation des nourrissons, car en bio on ne peut pas utiliser de poudre de lait. » Avec comme choix cornélien « Est-ce que je dois accepter de continuer à payer des factures ou privilégier mon salaire ? »

Aujourd’hui, le volume de production de lait bio est inférieur à celui d’un atelier conventionnel. Un choix assumé et une philosophie de travail qui portent tout de même leurs fruits. Le prix du lait bio à 465 €/tonne a permis à Emmanuel de mieux supporter la crise actuelle de la filière lait.

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