[Gestion] Réformer le foncier

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[Gestion] Réformer le foncier

«Réforme du droit foncier: demander l’impossible», tel était le mot d’ordre du colloque, organisé les 15 et 16 mars, à Poitiers.

Universitaires, juristes, notaires, experts…, ont planché sur la réforme du droit foncier rural, les 15 et 16 mars derniers, à Poitiers.

Artificialisation des sols, difficultés d’accès au foncier pour les jeunes agriculteurs, contournement des Safer et démantèlement des exploitations, contentieux sur les droits de préemption entre les agriculteurs dits «actifs» et les autres qui font faire le travail à façon, pratique des «pas de porte», rattachement au foncier de droits à produire ou de droits à paiement (DPB) négociables sur le… «Bon Coin», restriction des possibilités d’exploitation en présence de contraintes environnementales… : le droit foncier fourmille de questions plus ou moins nouvelles au regard de l’arsenal juridique existant. Certes, des évolutions sont apparues en 2006 avec la création du bail cessible et du bail environnemental. Mais cela ne suffit pas manifestement.

Le prix des terres a été freiné

L’association française de droit rural qui tenait un colloque jeudi et vendredi 15 et 16 mars, à Poitiers, s’en est fait l’écho. La plupart des intervenants ont appelé à un toilettage du droit et des outils de régulation foncière tels que le statut du fermage, vieux de 70 ans, et les Safer, nées en 1960. En revanche, personne n’est prêt à renverser la table. Plutôt réformer que révolutionner, s’exclament les notaires, avocats et autres juristes. Certes, des failles existent aujourd’hui en matière de droit foncier. Mais on est parvenu pour l’instant à freiner l’inflation des prix de terres en France en comparaison des prix pratiqués dans les pays riverains qui dépassent généralement les 20.000€/ha! Ce qui est bon pour la compétitivité de la Ferme France. La réglementation foncière qui existe actuellement dans le pays, n’est sans doute pas étrangère à cette évolution contenue des prix. On redoute aussi les effets d’une libéralisation totale du marché foncier qui risquerait de pénaliser encore davantage le rythme déjà faible des installations en agriculture. Certains observateurs craignent une «captation» du foncier par des financiers et divers autres fonds d’investissement.

Plusieurs approches opposées

Le débat sur ce sujet est volontiers passionné. Il catalyse en effet différentes approches –patrimoniales, économiques, environnementales et même sociétales– souvent opposées. Le monde agricole est aux avant-postes sur ce sujet. Les représentants des syndicats agricoles, appelés à s’exprimer le 15 mars, n’ont pas tout à fait la même vision, sur l’arbitrage des intérêts entre bailleurs et preneurs par exemple. Mais tous considèrent la terre comme un outil de travail à protéger absolument pour garantir la possibilité d’en faire son métier.

Les agriculteurs sont de moins en moins seuls toutefois à s’intéresser à cette question. Les associations, la société civile et les collectivités se préoccupent elles aussi, du foncier. A la fois en termes de partage des surfaces pour entrevoir d’autres usages que la seule production de biens alimentaires, mais aussi en termes de qualité de l’eau ou des paysages, qui dépendent directement des modes d’exploitation. On annonce une prochaine loi foncière d’ici un an ou deux. A l’heure où de nombreuses autres réformes sont en débat dans le pays, celle-ci aura sans doute moins d’écho médiatique, mais ne sera pas forcément plus simple à réussir!

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