Ai-je le droit… d’interdire l’usage personnel du téléphone ou d’un ordinateur sur le lieu de travail du salarié?

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Ai-je le droit… d’interdire l’usage personnel du téléphone ou d’un ordinateur sur le lieu de travail du salarié?

Portable et conduite, même au champ, ne font pas forcémement bon ménage. Attention à la concentration!

Non, l’employeur ne peut pas imposer aux salariés d’interdiction absolue d’utiliser les outils connectés (téléphone, internet, tablette…) à des fins personnelles. En revanche, il peut y mettre des restrictions… à condition que cela se justifie. Explication et exemple.

La réponse de la Commission nationale informatique et liberté (Cnil) a le mérite de la clarté : « Une utilisation personnelle de ces outils est tolérée si elle reste raisonnable et n’affecte pas la sécurité des réseaux ou la productivité. C’est à l’employeur de fixer les contours de cette tolérance et d’en informer ses employés. »

La technologie a souvent une longueur d’avance sur la loi. S’il ne peut pas tout prévoir, l’employeur agricole peut en revanche se fier à une règle de bon sens : la justice sanctionne généralement les abus, d’un côté ou de l’autre. D’où l’importance d’identifier et de cadrer l’usage normal des appareils connectés.

Un grand principe : l’utilisation d’un téléphone portable (et tablettes etc) personnel ou d’un usage personnel des outils professionnels ne doit pas se faire au détriment des tâches que doit réaliser le salarié dans le cadre de son contrat de travail.

En effet, la justice respecte de grands principes :

  • Le salarié ne peut utiliser son temps de travail à d’autres fins que celles pour lesquelles il est rémunéré.
  • L’obligation de loyauté à l’employeur : le temps de travail et la connexion internet ne peuvent être utilisés pour dénigrer l’entreprise ou transmettre des informations à un concurrent.

Sécurité avant tout

L’employeur a tout intérêt à encadrer un usage « normal », mais aussi les activités à risque souvent au menu du salarié de Cuma ou  du salarié agricole : ce peut être le cas des activités de conduite, de chantier, de manipulation de produits phytos… en bref, toutes les tâches qui requièrent une attention soutenue pour des raisons de sécurité.

Si la cuma fait travailler plusieurs salariés, des règles de respect du collectif de travail peuvent aussi être écrites, en demandant à chacun de rester discret dans ses communications pour ne pas perturber le travail des autres.

En pratique : utilité du règlement intérieur « salarié »

Le mieux pour un employeur, agricole ou pas, est de circonscrire et d’accompagner les salariés dans leurs pratiques.

Lors du Forum national Emploi du réseau Cuma, une séquence était dédiée au Règlement intérieur Salarié (distinct du Règlement intérieur de la cuma). Un document –non obligatoire pour les employeurs de moins de 20 salariés-  bien utile pour fixer des règles et un cadre de travail. Et donc éviter les conflits.

La Fédération régionale des Cuma de l’Ouest propose par exemple, dans son modèle de Règlement intérieur « salarié », validé par la Direccte, un article dédié, assez général pour être valable dans toutes les Cuma employant des salariés :

Communications téléphoniques et internet

L’utilisation d’internet, du téléphone, du fax et de la messagerie électronique de l’entreprise peut être réalisée pour un usage personnel à condition d’être utilisés de bonne foi.

Les communications à caractère personnel reçues ou données au cours du travail doivent être limitées aux cas d’urgence.

Un article auquel l’employeur en cuma peut rajouter des précisions concernant ses propres activités, par exemple : « Pour des raisons de sécurité, l’usage personnel des téléphones portables et autres appareils de communication mobiles est limité aux cas d’urgence pour les activité requérant toute l’attention des salarié, notamment la conduite des véhicules et des matériels et la préparation des produits phytosanitaires ».

C’est normal ?

La Cnil le rappelle : « Un employé a le droit, même au travail, au respect de sa vie privée et au secret de ses correspondances privées », à condition que ces courriers, fichiers,… soient étiquetés comme « privés » ou « personnels ».

Si la justice entre dans la boucle, ce sont surtout les données « génériques » qui vont être utilisées, c’est-à-dire le temps passé et le nombre de connexions.

Par exemple : un salarié qui passera un quart de son temps de travail sur sa messagerie personnelle peut être sanctionné par la justice, tout comme celui qui téléphone en conduisant, ou celui qui se connecte 5000 fois par mois à sa page Facebook personnelle sur son temps de travail.