Brins longs et éclatement au banc d’essai

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Brins longs et éclatement au banc d’essai

Dans les essais sur les deux stations, la production laitière n’a pas été impactée par la longueur des brins produits lors de l’ensilage.

Né aux États-Unis, l’ensilage de maïs dit « brins longs » est développé par plusieurs constructeurs d’ensileuses. En France, les premiers essais, dont ceux réalisés par Arvalis, rendent leur verdict.

L’objectif affiché de l’ensilage brins longs est d’obtenir un niveau d’éclatement du grain optimal et de recouper les tiges dans le sens de la longueur. Des enjeux conséquents en termes de valorisation de la ration et de performances laitières sont affichés par les promoteurs de la technique. Par ailleurs, sur le terrain, éleveurs ou techniciens constatent des gaspillages d’amidon jugés par la présence de particules de grains dans les bouses et c’est l’insuffisance d’éclatement qui est pointée du doigt.

Pour objectiver l’impact de l’éclatement du grain et celui de la taille des brins, deux essais de 8 semaines (précédées de 2 semaines de transition alimentaire), ont été mis en place sur les fermes expérimentales de la SAS Ferme expérimentale des Trinottières (49) et de la Jaillière (44) au cours de l’hiver 2018-2019(1).

Trois modalités de récolte

Sur chaque station, le maïs fourrage a été récolté en bandes alternées selon trois modalités: E- (éclatement insuffisant, brins courts, éclateur classique), E+ (éclatement optimal, brins courts, éclateur classique) et SCH (éclatement optimal, brins longs, éclateur rainuré en croix). Les réglages de la longueur de coupe et de l’écartement entre les rouleaux éclateurs ont été ajustés sur chaque site et chaque modalité.

Ce dispositif de récolte a permis d’obtenir des maïs de composition chimique proche, afin de comparer uniquement l’effet du mode de récolte. Les maïs fourrage ont été récoltés à une teneur en MS élevée (35,8% MS aux Trinottières, 38,5% MS à la Jaillière). A ces stades, le grain contient environ 50% d’amidon vitreux sur une génétique cornée à cornée-dentée.

graphique des rations distribuées

Rations distribuées pour les trois lots de vaches laitières sur les deux stations expérimentales.

Sur chaque station, les 3 lots de 20 VL ont reçu une ration complète mélangée distribuée deux fois par jour avec un contrôle quotidien de l’ingestion individuelle et des performances. Le maïs a été incorporé à hauteur de 67% ou 72% de la ration en MS selon les sites (cf graphique). La part de maïs volontairement élevée avait pour objectif d’extrémiser les effets éventuels des modalités de récolte. Les rations bâties sur chaque site sont identiques en termes de densité énergétique et protéique entre chaque lot et ont été bâties selon les critères objectifs de respect d’équilibre chimique: teneur en amidon et fibres NDF/cellulose brute dans la ration.

Une conservation équivalente

Des mises en garde sur la qualité de conservation du maïs brins longs ont été avancées par certains auteurs, notamment en lien avec un tassement plus difficile induisant une densité de silo inférieure, jusque -12% par rapport à un maïs conventionnel. Dans les conditions expérimentales de nos deux stations en silos couloir, la densité des silos a été équivalente entre les trois modalités de récolte. Les qualités de conservation ont été évaluées par analyse (pH, acide lactique, propionique, butyriques, alcools, ammoniac) et n’ont pas montré de différence significative entre modalités.

Pas d’effet sur les performances

Malgré la part de maïs fourrage élevée dans les rations, ces dernières ont été assez sécurisées d’un point de vue digestif avec des teneurs en amidon inférieure à 23% de la MS ingérée et en cellulose brute supérieure à 19 % de la MS ingérée. L’apport de fibres longues par le maïs fourrage n’a eu d’effet ni sur l’ingestion, ni sur les performances laitières. La valorisation des fibres n’a pas été améliorée avec cette technique de récolte. Ces résultats sont concordants avec la bibliographie existante sur les 10 essais indépendants réalisés aux USA et en Allemagne. Malgré l’aspect plus grossier du maïs fourrage, le tri des grosses particules (en proportion par rapport au volume distribué) n’a pas été augmenté avec la présentation du maïs fourrage en brins longs.

échantillon de mais ensilé

Plusieurs constructeurs développent des outils pour un ensilage ‘brins long’, avec des configurations d’éclateurs proches (DuraShredder, XCut…). Ils présentent une configuration spécifique (rainurage en croix) et un différentiel de vitesses élevé (40 à 50 %, contre 20 à 30 % pour l’ensilage ‘classique’).

Dans le contexte des essais, maïs distribué après 6 mois de conservation, aucun effet de l’éclatement du grain sur les performances zootechniques n’a été observé. Quelle que soit la modalité, les teneurs en amidon dans les bouses ont été assez faibles (<4 % de la MS). Toutefois, une meilleure digestibilité de l’amidon a été observée pour les animaux du lot E+ par rapport à ceux du lot E- (+1,2pt à la Jaillière, +2,8pt aux Trinottières), sans impact sur les performances laitières.

Attention, la qualité de l’éclatement du grain reste néanmoins importante, notamment dans le cas d’ouvertures précoces de silo et avec les maïs récoltés à des stades tardifs. Dans les deux essais, malgré des niveaux d’éclatement insuffisants du maïs E-, aucun grain n’était intact dans ces modalités. Cela a nécessairement favorisé l’évolution de l’amidon en fermentation et sa valorisation par les ruminants.

(1)Projet France AgriMer Eclat’ maïs piloté par Arvalis, avec l’Inra, Idele et Germ services

Retrouvez le résumé de ces résultats en vidéo: L’ensilage brins longs n’a pas eu d’effet sur les performances