Une fiche pour formaliser l’état des lieux du matériel

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Une fiche pour formaliser l’état des lieux du matériel

La cuma du Sillon (56) teste sa fiche d’état des lieux sur le matériel de fenaison cette année. Le président espère entre autres qu’elle aidera à faire durer les outils.

L’accumulation des pannes et des casses finit par coûter cher à un groupe qui se partage du matériel. A cela, s’ajoute le risque d’une ambiance de travail dégradée. Afin de responsabiliser les adhérents au maintien en parfait état des outils, une cuma met en place un nouveau système.

Et si la solution miraculeuse tenait en une feuille A4? A la cuma, jamais aucun matériel ne passe de la main d’un adhérent à celle d’un autre adhérent avec des dents en moins, des éléments tordus, une prise à réparer, un phare HS… tous sont toujours nickels et, à chaque casse, le coupable y remédie sans mauvaise volonté.

A Guer, dans le Morbihan, la cuma du Sillon parviendra peut-être à ce résultat idyllique. Elle teste en tout cas cette année un outil, assez simple, pour résoudre un point noir qu’elle n’est certainement pas la seule à rencontrer. «Quand il y a une casse, on a souvent du mal à déterminer qui en est à l’origine», constate Mickaël Pihéry, le président de la cuma. Son expérience: renseigner une fiche d’état des lieux. Elle sera menée sur les faneuses et andaineurs cette année.

Ecrire pour se prémunir de la mauvaise foi

Pour ces matériels, la cuma s’organise par groupes de trois à quatre voisins. Or, même avec ce fonctionnement, elle se confronte au problème des bobos jamais réparés qui s’accumulent parce que personne ne s’en sent assez responsable. Désormais, à chaque fois qu’il prendra en main un de ces outils rotatifs, l’adhérent devra prendre une minute pour en faire le tour et valider, point par point, son bon état.

Un historique pour les responsables

La fiche d’état des lieux prévoit une colonne pour la même opération, en fin d’utilisation, où il est facile de noter ce qu’il y a à signaler. Bien sûr, «il peut arriver qu’on ne se rende pas compte quand on casse quelque chose mais, dans ce cas-là, le suivant note le défaut à sa prise du matériel.» Ainsi, la cuma dispose d’une trace écrite qui lui permet de déterminer à qui elle doit s’adresser. «Ça nous aidera à prendre les décisions», insiste le président.

La cuma a beau avoir 4 salariés permanents, «ils ne sont pas toujours à la cuma» et leur rôle n’est pas de surveiller les allées et venues des engins dans la cour. De plus, le matériel de fenaison, par exemple, reste le plus souvent sur les fermes des différents groupes… «Souvent, les salariés identifient les problèmes, mais trois ou quatre jours après.»

De bonnes bases pour une bonne ambiance

Trop souvent, l’adhérent ni vu, ni connu, n’est donc pas mis à contribution pour la réparation. Le préjudice pour la cuma va au-delà: le président cite en exemple un distributeur sur un tracteur arraché avec une remorque… «800 ou 900 euros que le gars à qui c’est arrivé n’a pas voulu payer», en justifiant que d’autres, en restant silencieux dans pareils cas, n’avaient pas été mis à contribution. La qualité du service en pâtit et, à la fin, c’est parfois la cuma elle-même qui doit prendre en charge les conséquences économiques de la réparation. Or, «la cuma ne peut pas continuer à payer elle-même» pour ces pannes signées d’un X.

Entre ces considérations économiques et le désagrément justifié que l’adhérent éprouve lorsqu’il prend un outil et doit commencer par sa réparation, ce phénomène contre lequel la cuma cherche à lutter, peut vite gripper l’ambiance du groupe.

Un outil d’entretien d’ambiance

«Nous avons déjà mis en place une commission de discipline pour traiter ces sujets», explique le président, «mais elle a besoin d’outils pour être efficace.» Si celui-ci satisfait, il sera généralisé à tous les matériels à disposition des adhérents: remorques, tracteurs, télescopique… Il faudra alors que la fiche puisse s’insérer dans un carnet afin que l’état des lieux et le relevé du compteur soient consignés au même endroit.

A voir comme un outil de prévention

L'avis d'Olivier Escats, responsable d'agence Loxam à Vannes

L'état des lieux est une priorité dans notre activité de la location de matériels. Il y a deux raisons à cela et elles me paraissent compatibles avec un fonctionnement en cuma : Le contrôle des points stratégiques apporte à notre clientèle une garantie d'utilisation optimale et en toute sécurité de la machine. Par ailleurs, il permet de détecter au plus vite les problèmes afin d'éviter des coûts importants d'entretien, ainsi que des immobilisations à des périodes où le temps de tout le monde est compté. Le but est d'avoir un gain financier
Même formalisé avec un document succin, ce contrôle par l’utilisateur est pertinent. Il ne doit pas excéder cinq minutes, pour une vérification des niveaux d'huile, l'état du filtre à air, la sécurité (frein, feux) et l'état des pneumatiques. Il faut être rigoureux sur ces quelques points de contrôle, mais une analyse simple et binaire, c’est-à-dire « bon ou défectueux », suffit.
Je pense que la mise en place de ce document écrit permettra de responsabiliser les utilisateurs. Il faut surtout le voir comme un outil de prévention. Les casses ou une erreur humaine peuvent toujours arriver. Informer et notifier ces informations permettront d'éviter d'éventuels litiges.
feuille_bon travaux_entretien

Avec ce tableau à remplir à chaque prise en main, les responsables espèrent sensibiliser les adhérents au maintien en état des outils.

Le sentiment d’une obligation supplémentaire à travailler correctement

L'avis de Dominique Guého, directeur de la fédération des cuma du Morbihan

Cet état des lieux est un outil pratique pour faciliter le travail du responsable de matériel. Car la tâche la plus lourde n’est pas d’avoir à réfléchir aux renouvellement de matériel, mais bien de gérer le quotidien avec des matériels qui sont rendus avec des éléments cassés. C’est un peu comme dans un couple où les questions de chaussettes sales mal rangées et de tube de dentifrice laissé ouvert minent les relations. Avoir à régulièrement réparer un matériel pour l’utiliser rebute les adhérents.
Avec cette fiche, nous avons listé les points de contrôle importants. Déjà, ça appuie ce à quoi il faut faire attention quand on utilise le matériel. En un sens, ça responsabilise l’utilisateur de l’outil. Par exemple, s’il note qu’un phare est défectueux en prenant l’engin, il assume le fait qu’il a vu qu’il y avait un problème et qu’il l’a tout de même utilisé. Pour le groupe, ce doit être une obligation supplémentaire à travailler correctement.
Cet état des lieux était une demande de la cuma et pour moi, c’est une bonne idée qui va dans le sens de la professionnalisation de l’usage partagé du matériel et de l’amélioration du fonctionnement des groupes. Les réservations, le suivi des utilisations… A l’avenir, il est probable que tout se fera via les smartphones. Ce sera très simple d’intégrer cette fonctionnalité de renseignement d’un état des lieux dans ces applications informatiques.