Les jeunes font revivre la cuma

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Les jeunes font revivre la cuma

Gaël Eyssautier, président de la cuma d'Annot : «Nous sommes tous sur le principe de l'entraide. Dans la cuma, tout le monde apprend à travailler ensemble plutôt qu'en concurrence.»

Comment de jeunes adhérents reprennent en main une cuma endormie? La cuma d’Annot est une belle démonstration de l’intérêt de jeunes agriculteurs pour le collectif. Loin des clichés individualistes, ils sont prêts à mettre des projets en œuvre pour faire de la cuma un outil pour leurs exploitations.

Gaël Eyssautier est jeune papa et jeune président de la cuma d’Annot. «Nous sommes une dizaine d’adhérents et la cuma a une trentaine d’année.» Dans le canton, les productions sont diversifiées: bovin lait, bovin viande, ovin, caprin, volailles, céréales, foin, truffe et apiculture. «Nous sommes installés en gaec avec ma mère. Mon père est installé en individuel. Dans la cuma, certains jeunes sont en gaec. La moitié d’entre nous sommes installés depuis moins de 7 ans. Et plus de la moitié ont moins de 25 ans.»

Pendant de nombreuses années, Gaël a vu son père assurer la présidence de la cuma. «Elle servait surtout pour la moisson» se souvient sa maman. «Nous faisions un méchoui chaque année, c’était sympa.» Pendant 20 ans la cuma est très active, puis elle entre en sommeil pendant cinq ou six ans. Avec l’arrivée de jeunes installés et le renouvellement des générations, la cuma reprend du poil de la bête et s’est engagée dans des investissements réfléchis.

Reprise des investissements

«Nous avions collectivement besoin d’un épandeur, d’un broyeur pour continuer à travailler en cuma. Depuis un an et demi ou deux ans, j’avais le projet d’acheter un tracteur et une presse à matelas, pour ma bergerie. Mon père aussi et un des voisins envisageait le même achat. C’est un investissement de 125.000 euros hors taxe et en passant par la cuma, nous décrochions 25.000 euros de subvention, avec des délais courts et un paiement rapide. C’est motivant. Nous avons eu la même démarche pour des rouleaux. L’après semis intéresse tout le monde. Nous avons donc investi dans deux rouleaux, un à l’est et l’autre à l’ouest de la zone géographique cuma. Clairement, tout le monde en a l’utilité, mais personne ne mettrait 10.000 euros sur un rouleau individuellement. Là, entre la subvention et les dix adhérents qui étaient intéressés, nous avons pu l’acheter à 14.000 euros hors taxe.

Cette année, sans subvention, nous changeons notre moissonneuse, qui avait plus de trente ans. Nous allons en acheter une d’occasion, révisée et garantie, pour 16.000 euros. En réalité elle en coûte 20.000 mais nous faisons reprendre l’ancienne. Quasiment tout le monde l’utilisera et même sans subvention, son utilisation restera d’un coût correct.»

Les investissements témoignent d’un réel intérêt pour la cuma. «Nous avons besoin d’investir pour être le plus possible autosuffisants, surtout quand on voit le prix des céréales. Pour nous c’est important d’être de plus en plus autonome. La plupart d’entre nous sont récemment installés. Nous avons d’autres investissements sur nos exploitations. C’est pour cette raison que le projet de charrue, ce sera plus tard, pour aller avec le tracteur.» La moitié des cumistes sont fils ou filles d’agriculteur, la moitié s’est installée hors cadre familial. «Etre plusieurs jeunes ça donne une bonne dynamique. Nous sommes tous sur le principe de l’entraide. Dans la cuma, tout le monde apprend à travailler ensemble plutôt qu’en concurrence.»

Jeunes et cuma

Cuma de la Basse Vallée du Jabron : «La cuma, c’est aussi des liens qui font que nous pouvons aussi être constructifs sur d’autres problèmes que le partage de matériel.»

De l’enthousiasme à la cuma de la Basse Vallée du Jabron

Il y a 10 ans, l’arrivée de jeunes adhérents a relancé la cuma, en sommeil depuis quelques temps. «Nous sommes 11 adhérents. Il y a une dizaine d’années, les agriculteurs de la cuma n’étaient plus trop motivés. Certains stoppaient leur activité, tout le matériel était amorti. Ils n’avaient pas trop envie d’investir. Nous n’étions pas adhérents. Plus jeunes, plus récemment installés, nous avions le projet de monter une cuma. Nous avons alors contacté l’animateur de la fdcuma. Il nous a parlé de la cuma existante. Nous avons refait les statuts et redémarré son activité» se souvient Claude Latil, l’actuel président.

Motivés, les nouveaux adhérents s’engagent dans de nombreux investissements. «Nous avions besoin de matériel en commun» précise l’une des adhérentes. Epareuse, mini charrue, andaineur, matériel de fenaison, herse étrille, combiné de semoir et tracteur, etc. «Nous avons donc investi 280.000 euros en 9 ans, soutenus par des subventions.»

A plusieurs, c’est possible

Géographiquement, la cuma couvre toute la vallée du Jabron, jusqu’à Sisteron. «En ce moment nous sommes en réflexion pour une ramasseuse de pierre.» Les adhérents ont en moyenne une quarantaine d’années et certains sont installés hors cadre familial. «La cuma permet des investissements que nous ne pourrions pas nous permettre pour une seule exploitation. Du matériel comme l’épareuse par exemple, les moyens nous auraient manqué, alors que là, à plusieurs, c’est possible.» Enthousiastes, les adhérents évoquent avec plaisir les liens qu’ils tissent au quotidien, le repas qu’ils ont organisé avec les anciens adhérents par exemple. «Nous avions aussi invité l’ancien et le nouvel animateur de la fdcuma. C’était un beau moment. La cuma c’est aussi ce relationnel. Au fil du temps, nous avons appris à nous connaître. Nous discutons d’autres sujets, et finalement nous pouvons aussi être constructifs sur d’autres problèmes que le partage de matériel.»

Article extrait du numéro spécial Entraid’ Provence-Alpes-Côte d’Azur – décembre 2019.