[Interview] Pour les JA, les coops doivent servir le revenu de leurs adhérents

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[Interview] Pour les JA, les coops doivent servir le revenu de leurs adhérents

Pour Jérémy Decerle, président des Jeunes Agriculteurs, les coopératives doivent permettre de booster le revenu des agriculteurs, notamment en permettant l'augmentation de la valeur ajoutée.

Entraid a rencontré Jérémy Decerle, président de Jeunes Agriculteurs, à la veille du lancement des Etats généraux de l'alimentation. Pour le jeune éleveur bourguignon, les coopératives sont un outil de référence pour permettre aux agriculteurs de vivre de leur métier. Selon lui, elles doivent montrer l’exemple de bonnes relations au sein de la chaîne de valeur, en particulier sur la prise en compte des coûts de production.

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Entraid: Qu’attendez-vous des coopératives agricoles lors de ces Etats généraux de l’alimentation ?

Jérémy Decerle: Politiquement, elles doivent jouer leur rôle ! Nous devons réussir à travailler ensemble. Il n’y a aucune raison pour que les coops ne se positionnent pas sur ces sujets de politique agricole et alimentaire. Certes, leur rôle est économique, mais lors de ces Etats généraux, elles doivent aller plus loin.

Nous les attendons au tournant. Sur la contractualisation des volumes et des prix, mais aussi sur l’organisation de l’offre, en particulier pour la structurer au niveau régional. Les coopératives doivent nous aider à trouver nos débouchés, à massifier notre offre, tout en assurant des volumes, de la qualité et de l’homogénéité dans nos produits. On les attend aussi sur la création de valeur ajoutée.

Quelle est la vision coopérative de votre syndicat, quelles relations entretenez-vous avec le monde coopératif ?

Lors de notre rapport d’orientation 2013, nous avons réaffirmé cash que la coopération agricole était l’outil d’excellence pour sécuriser le revenu des agriculteurs. Pour autant, certaines coopératives ont mis de côté leurs missions premières qui étaient de servir le revenu de leurs adhérents. En se diversifiant, les intérêts de ces derniers ont été relégués au second plan. Elles ne respectent plus leurs engagements de départ, ce pour quoi elles ont été créées.

Les paysans, comme les coopératives, se sont peut-être dissociés du mutualisme qui les caractérisait au début. Le chacun pour soi ne nous a pas réussi a priori. Les concentrations ne sont pas un problème à condition de respecter une certaine éthique, et les fondamentaux, ce pour quoi elles ont été imaginées. Une coopérative n’est pas une entreprise comme les autres, or elle se considère et se comporte de plus en plus comme les autres.

Nous ne sommes pas un syndicat qui tire à boulets rouges sur les coopératives. Nous tenons d’ailleurs à renforcer nos liens. Au début de l’année, nous avons réintégré le conseil d’administration de Coop de France dans ce but. On a voulu remettre les choses à plat tout en alliant conscience que dans notre réseau de jeunes agriculteurs, les coops n’ont pas bonne presse partout. Mais en même temps râler sans être présents au sein des coops n’a pas de sens, y compris au niveau national. On a tracé un plan d’action, en espérant qu’il soit repris aux échelons régionaux.

Quelle valeur coopérative défendez-vous pour demain?

Je suis convaincu que si l’on veut sortir de l’ornière, il faut pousser ensemble et en même temps. Que les coopératives et les agriculteurs avancent ensemble. Ou alors elles n’ont pas besoin des paysans ? Sur la prise en compte de coûts de production, elles doivent montrer l’exemple. Elles ont également le devoir d’essayer de travailler entre elles, et non en concurrence, quand c’est l’intérêt des adhérents qui est en jeu !

Politiquement,  elles doivent montrer des signes de leur volonté à rééquilibrer les relations commerciales au profit des producteurs. Ce rééquilibrage doit d’abord venir d’elles. J’ai conscience qu’elles agissent dans un milieu concurrentielle mais elles doivent initier un mouvement, tout en évitant de se faire manger par les groupes privés. Aujourd’hui, les intermédiaires ne se cassent pas la figure, contrairement à la production agricole. Nous attendons de la coopération agricole qu’elle soit active en la matière, y compris pendant les Etats Généraux, et qu’elle le soit de manière constructive. Au niveau national, elles le sont, elles doivent l’être sur le terrain.

Quelles sont pour vous les choses à faire évoluer ?

En premier lieu, il y a un certain nombre de choses à revoir dans la gouvernance coopérative afin de faciliter le renouvellement des équipes dirigeantes : limiter l’âge et les mandats successifs par exemple. Ensuite il faut une politique cohérente en matière d’installation, afin que les profils accompagnés par les coops soient les mêmes que ceux qui entrent dans un parcours d’installation aidée (DJA- statut JA). Il n’est pas rare de voir des coops accompagner des nouveaux installés qui ne sont pas passés par le dispositif mis en place spécialement pour les jeunes. Que doit-on en conclure ?

 

Cette interview a été réalisée en amont du dossier « Installation: rendre les coops éternellement jeunes » à lire dans le mensuel d’Entraid de septembre.