Au printemps 2024, un millier de Danois se réunissaient pour célébrer les « funérailles » d’un fjord, à Vejle. Cet acte symbolique partait d’un constat concret : l’écosystème du fjord a été littéralement asphyxié par les activités humaines, rejets agricoles en tête. Ce tout petit pays est bordé de plus 8 000 km de côtes, le point le plus éloigné de la mer est à 52 km de l’une d’entre elles. Les Danois savent aussi qu’une partie de leurs terres émergées va disparaître, en raison de l’augmentation du niveau des mers due au réchauffement climatique. Retour sur la taxe carbone de l’élevage au Danemark et la renaturation.
Agriculture efficace
Grand exportateur de viandes, de produits laitiers et de boissons alcoolisées (bière en tête), le Danemark s’appuie sur de grandes fermes rationalisées, une industrie agroalimentaire dynamique, et une culture de la recherche appliquée très pointue. 64 % de la surface nationale est dédiée à la production agricole (contre environ 50 % en France).
Les sujets du Royaume du Danemark sont particulièrement fiers des avancées environnementales nationales. Les agriculteurs consacrent déjà 12 % des surfaces agricoles à la filière bio, qui occupe une place importante dans le secteur. Le Danemark maîtrise l’innovation sous contrainte : les autorités y réglementent déjà strictement les épandages de phytosanitaires et d’engrais afin de préserver la qualité de l’eau.
Le pays, sur sols majoritairement sableux, ne dispose pas de ressources aquifères protégées. C’est cette expérience accumulée, et toutes les contraintes naturelles qui affectent ou vont affecter le pays qui ont amené cette réflexion au niveau des responsables danois : ne vaut-il pas mieux carrément consacrer des surfaces entières uniquement à la nature ?
Taxe carbone pour l’élevage au Danemark
Fruit d’un consensus avec le Conseil national pour l’agriculture et l’alimentation, la société danoise de protection de la nature et d’autres organisations, l’accord dit « Tripartite vert », signé en novembre 2024, a introduit la première taxe carbone au monde sur les émissions d’élevage effective en 2030, le doublement des surfaces, déjà conséquentes, en bio, mais également des objectifs de réduction des pertes en azote, de gaz à effet de serre et des actions drastiques pour ramener de la biodiversité. Cela a une échelle inédite : 15 % des terres arables en production vont être converties en espaces naturels (tourbières, forêts…).
L’accord prévoit également la création de 21 parcs nationaux d’ici à 2030, ainsi qu’un plan de végétalisation de l’alimentation. Un ministère lui est dédié. Ce dernier affronte aujourd’hui la réalité de ce plan : quelles mesures prioriser ? Ne paie-t-on pas « trop » les agriculteurs ? La société civile fait aussi remonter des questions intéressantes sur la vivabilité du pays. Faut-il investir tant dans les territoires côtiers voués à disparaître avec la montée du niveau de la mer ? Ne faut-il pas repenser l’habitat dans les villes, puisque inévitablement le pays va se densifier ? Des questionnements très différents de ceux qui se poseraient en France, à situation égale.
Une industrie « comme les autres »
En 2019 déjà, le gouvernement décidait de freiner l’expansion de l’industrie aquacole. Le but : réduire ses impacts sur les écosystèmes environnants.
Dans ce pays, le lobbying agricole et environnemental exerce une influence équivalente. On y considère l’aquaculture et l’agriculture comme des industries ‘comme les autres’. À la fin de l’année 2024, la coalition gouvernementale a dévoilé son accord ‘tripartite vert’.
Taxe carbone pour l’élevage au Danemark : pourquoi ce sujet ?
Le Danemark est un laboratoire intéressant pour l’agriculture. Très performant économiquement et en termes de production, il est capable d’emprunter une voie radicalement différente de ses voisins. Dans ce petit royaume parlementaire, de culture luthérienne, la population érige la modestie, le compromis et le pragmatisme en valeurs cardinales.
Il est aujourd’hui sous les feux de l’actualité. Pourquoi ? En raison de l’appétit américain pour les ressources du Groenland, territoire danois, tout comme les Îles Féroé. Soumis à de nombreuses contraintes naturelles ou géopolitiques, les Danois ont fait preuve jusqu’à présent d’imagination pour trouver des solutions originales et efficaces.
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