D’anciens kolkhozes de l’ex-URSS aux agro holdings ukrainiennes capitalistiques, l’Ukraine a fait le grand écart en matière de production agricole, expliquent Yves Le Morvan, Responsable Filières et Marchés chez Agridées, et Bernard Valluis, consultant également pour Agridées, dans une note dédiée à l’élargissement de l’Union européenne. Si ces structures représentent 80 % des exploitations ukrainiennes, les 20 % restants sont représentés par de très petites structures à destination vivrière, expliquent-ils. Toutefois, sur le plan agricole, l’Ukraine est devenue ces dernières années un fournisseur majeur des pays de l’Union européenne, dont l’Espagne, l’Allemagne, la Pologne et les Pays-Bas. Et sa force de frappe à l’export est considérée comme une force. En revanche, les flots de productions agricoles ont aussi la capacité de déstabiliser fortement l’agriculture de zones « intermédiaires » de l’Union européenne, moins compétitives.
D’où viennent les agro-holdings ukrainiennes ?
La Genèse des agro-holdings ukrainiennes est directement liée au démantèlement des anciens kolkhozes, après la chute du régime soviétique, expliquent les auteurs.
L’indépendance de l’Ukraine en 1991 a conduit au rétablissement de la propriété privée. Puis à la redistribution de droits de propriété. De nombreux titulaires de certificats fonciers ont loué leurs terres à des entreprises familiales ou à des sociétés financières.
Ces structures, des « banques foncières », ont peu à peu constitué d’immenses domaines agricoles. Certaines filiales exploitent jusqu’à des centaines de milliers d’hectares. Elles ont été aidées en cela par l’encadrement des loyers et le bas coût du travail.
Ces structures très compétitives sont aussi caractérisées par une très forte intégration verticale, tendue vers l’export.
Qui détient et finance les agro-holdings ukrainiennes ?
Yves Le Morvan et Bernard Valluis notent qu’aujourd’hui ces agro-holdings sont détenues par des oligarques et des fonds d’investissements. Ils citent notamment BNP Asset Management Holding, NN Investment Partners Holdings (Goldman Sachs), le fonds souverain norvégien.
Ils peuvent aussi être directement contrôlés par des fonds internationaux, notamment américains, avec pour partie leur siège à l’étranger. « Les agro-holdings bénéficient-ils à l’Ukraine, ou d’abord à des capitaux extérieurs ? », s’interrogent-ils.
Cerise sur le gâteau, notent encore Yves Le Morvan et Bernard Valluis, « les agro-holdings, qui fonctionnent avec de hauts niveaux d’endettement, doivent compter avec leurs créanciers ». Parmi ces derniers : « La Banque Mondiale, par l’intermédiaire de la Société Financière Internationale (SFI), et les institutions européennes, Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement et Banque Européenne d’Investissement. « L’Europe finance les agro-holdings, » concluent-ils.
Quels sont les enjeux pour l’agriculture ukrainienne et que lui apporterait l’Union européenne ?
L’agriculture ukrainienne profite de très peu de soutien. « Elle est très orientée vers les marchés, sans réelles aides du gouvernement, explique Olga Trofimtseva, ancienne ministre de l’Agriculture ukrainienne. Les exploitations doivent produire et vendre pour qu’elles soient rentables et ainsi faire des bénéfices. » Mais cela implique de grosses lacunes dans le développement rural et les cohésions des territoires.
Comme en Europe, les agriculteurs doivent aussi faire face au changement climatique et au renouvellement des générations. Les agriculteurs ukrainiens restent clairvoyants. « Ils savent qu’avec l’adhésion à l’Union européenne, il y aura plus de normes à respecter, qu’il y aura davantage d’exigences et de contrôles, fait remarquer l’Ukrainienne. Ce sont des sujets difficiles à appréhender pour les ukrainiens. »
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