Jeunes et cumistes… et alors ?

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Jeunes et cumistes… et alors ?

D’entrée, beaucoup de véhémence, pour dénoncer vigoureusement une grosse lacune dans l’enseignement agricole. Entretien avec Pierre Léonard, 33 ans, président des jeunes agriculteurs.

On se congratule en croyant que dans les centres de formation et les lycées agricoles, on est très pointu. Faux ! En réalité, on ne forme pas assez les jeunes destinés à s’installer, à découvrir et envisager ce qui, pour moi, est la base de l’installation, la mutualisation du matériel.

Ne parlerait-on pas assez cuma dans les parcours ?

PL. En tous les cas, pas suffisamment. La cuma est pourtant le premier outil qui va leur permettre de maîtriser leurs charges de mécanisation, charges qui sont le gros point noir pour les jeunes qui s’installent.

Vous trouvez donc que ces jeunes ne sont pas assez réceptifs aux avantages des cuma ?

PL. Je trouve en effet gravissime cette lacune dans le parcours de formation. Il est impératif et urgent de dire aux jeunes : la cuma, ça n’est pas forcément ce que l’on peut vous en dire par ci par là. La cuma, c’est ce que l’on en fait ! C’est avant tout un outil de travail qui permet d’amortir de lourdes charges, non pas tout seul, mais avec ses voisins, ses collègues. C’est ridicule de dépenser des sommes folles - que généralement l’on n’a pas… - dans du matériel qui sera utilisé une ou deux fois dans l’année !

Vous l’avez constaté dans votre parcours ?

PL. Oui, mais je suis arrivé associé dans une exploitation qui était déjà adhérente à une cuma.

Je voudrais que l’on puisse entrer dans les établissements de formation. Que l’on dise enfin aux jeunes les réalités du terrain. Oui, c’est difficile de gagner de l’argent ! Tout le monde sait qu’il faut travailler jusqu’à 120 h/semaine pour dégager un 3/4 de smic. Mais il y a des possibilités d’augmenter vos résultats, cela passe par un bonne maîtrise des charges de mécanisation. Et, plus de résultat veut dire plus de revenu !

Cela peut donc faire la différence ?

PL. Toute la différence ! C’est clair ! Cela fait entrer dans un groupe, dans une dynamique de territoire, avec, je le répète, moins de charges donc plus de revenus. La cuma est bel et bien un outil d’optimisation économique ! Pour que cet outil formidable perdure, il est aussi nécessaire que les jeunes, non seulement entrent dans les cuma, mais aussi participent aux responsabilités, et petit à petit, à leur tour prennent les rênes. 

Point de vue de Sébastien Lechevalier,
responsable des dossiers Installation au sein des JA Dordogne et Aquitaine

Pour moi, la cuma est un engagement logique quand on débute et que l’on manque cruellement de trésorerie. Cela crée aussi du contact, génère de l’entraide, une ouverture sur le territoire, ses voisins, la société ; c’est rassurant de savoir que d’autres ont les mêmes galères et qu’on peut les résoudre ensemble en cas de coup dur.
Alors bien sûr, il n’est pas toujours simple d’affronter les difficultés d’organisation. C’est là que le rôle du président prend tout son sens ; il doit savoir fédérer, faire un peu la police par rapport à trop de casse ou de négligences… Et tous ne doivent pas hésiter à se parler. On peut se dire les choses sans être obligés de se fâcher !
Sébastien Lechevalier, responsable des dossiers Installation au sein des JA Dordogne et Aquitaine