Faut-il maintenir les aides surfaciques ?

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Faut-il maintenir les aides surfaciques ?

35 % des agriculteurs sont d'abord favorables à des aides à l’hectare, 28 % à des aides environnementales et 27 % à des aides à l’actif. (Source : enquête BVA – fin 2023 près de 600 agriculteurs pour Terra Nova et le collectif Nourrir.)

La crise agricole qui a fait irruption sur le continent européen a conduit à assouplir certaines mesures. La fondation Terra Nova plaide néanmoins pour continuer la transition du modèle actuel et poursuivre la réforme la PAC, assise principalement aujourd'hui sur des aides surfaciques.

La Fnsea et les JA ont formulé 120 demandes suite à la crise de ces dernières semaines. Les revendications concernent les contraintes écologiques mais aussi la réforme de la PAC. Et bien d’autres champs : partage de la valeur, accords de libre-échange, simplification, fiscalité… « Cette hétérogénéité des demandes est une illustration de la diversité des modèles agricoles et des disparités de situations selon les bassins de production, en France et plus généralement en Europe », explique Terra Nova dans une étude de 24 mars sur la crise agricole.

Tenir l’objectif de zéro émission carbone

« En un an et demi, seize pays de l’Union européenne​​ ont été touchés par au moins une mobilisation agricole », note la fondation Terra Nova. Malgré la crise actuelle, l’agriculture européenne devra poursuivre les transitions du modèle actuel, considère cependant cette fondation qui publie différents travaux de recherche. « Elle devra impérativement se décarboner si l’on veut atteindre une Europe zéro émission d’ici 2050 (actuellement près de 12 %). Exposée à une perte de fertilité des sols et au stress hydrique dans un nombre croissant de régions européennes, elle devra impérativement adapter ses pratiques si elle veut préserver son avenir à moyen et long terme », analyse-t-elle.

Réforme de la PAC : des éco-régimes peu exigeants

Pour réussir la transition, la mise en œuvre des éco-régimes risquent de ne pas suffire. « L’Inrae affirme qu’ils n’auront pas d’effet positif. Le ministère de l’Agriculture reconnaît que près de 98 % des exploitations agricoles sont éligibles à un éco-régime qu’il a voulu délibérément accessible à tous », poursuit Terra Nova.

Des réponses de court terme ?

La fondation regrette en outre que les décideurs politiques nationaux et européens privilégient des réponses de court terme et des effets d’annonce. Au détriment de la résilience à long terme du système agricole et de sa transition écologique.

« La présentation par la Commission européenne de modifications des règles d’attribution des aides PAC a enfoncé le clou vendredi 15 mars. Dans cette nouvelle version, plusieurs conditions environnementales qui encadrent le versement des aides directes ont été abandonnées ou assouplies. »

Terra Nova voit donc dans ces décisions une forme de renoncement. « Les agriculteurs ne seront plus tenus de consacrer une partie minimale de leurs terres arables à des zones non productives, telles que les jachères. Et l’obligation de rotation des cultures, à l’échelle de la parcelle, a été transformée en simple diversification à l’échelle de l’exploitation. »

Reculer pour mieux sauter ?

De plus, l’étude cite l’assouplissement de la règle du maintien de prairies permanentes dans les exploitations. Ainsi que l’exemption de contrôle et de pénalité liés aux conditions environnementales dans les petites exploitations (moins de 10 ha). « L’impact ne sera pas le même selon les pays. Si en France, 38 % des exploitations ont une surface agricole utile de moins de 20 ha​​, en Pologne, elles représentent les trois quarts de l’ensemble des exploitations », affirme Terra Nova

Le think-tank redoute des reculs successifs. « Les pays disposent d’un délai jusqu’à fin 2025 pour traduire dans leurs plans nationaux l’actualisation des législations environnementales et climatiques européennes. Et en cas d’épisodes climatiques extrêmes empêchant les agriculteurs de respecter les exigences de la PAC, chaque pays serait libre d’introduire des dérogations temporaires. Cela afin que les exploitants concernés n’encourent pas de pénalité. Il est à craindre qu’à chaque évènement climatique, malheureusement de plus en plus fréquents, se multiplient les exceptions. »

 62 % des agris favorables à la transition écologique

« Or, les récents reculs risquent d’envoyer de mauvais signaux aux agriculteurs car, tôt ou tard, la transition aura lieu. Et elle ne sera pas indolore. Il faudra continuer à produire, avec des aléas climatiques fréquents, en utilisant moins de produits phytosanitaires et d’engrais minéraux. Cela « s’anticipe et s’accompagne » souligne la fondation, qui considère que faire évoluer sans cesse le cadre réglementaire est néfaste. Une grande majorité des agriculteurs le savent et agissent déjà pour transformer leurs pratiques. Dans l’enquête BVA Xsight, 62 % des agriculteurs estiment que la transition écologique est une nécessité.

Beaucoup d’incertitudes en 2028

La prochaine négociation du cadre financier pluriannuel (CPF), qui définit les ressources et dépenses de l’Union européenne pour 7 ans, risque d’être tendue. « La Commission a lancé l’élaboration du CFP 2028-2034 et les débats commencent. Le précédent CFP avait acté le maintien du budget de la PAC de la période précédente en euros courants pour les deux piliers. Mais les incertitudes sont fortes sur le prochain budget. De plus en plus de voix s’élèvent, notamment en Allemagne, pour réclamer une réforme en profondeur de la PAC. »

Des primes au « bien commun » à la place des aides surfaciques ?

Ainsi, certains décideurs politiques allemands réclament une réforme fondamentale de la PAC. Ils proposent  d’abandonner les paiements inconditionnels à la surface. Et ils se concentrent plutôt sur le principe d’une « prime au bien commun ». En France, certains candidats aux élections européennes préconisent de subventionner l’emploi. Mais sur ce sujet, on est loin du consensus…

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