Résister à la volatilité des prix !

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Résister à la volatilité des prix !

L'économie laitière est de plus en plus soumise aux fluctuations des cours.

Beaucoup d’agriculteurs se désolent des amplitudes dévastatrices des prix de vente de leurs produits. Lors du SPACE, des éleveurs laitiers français et étrangers ont relaté leur stratégie pour contrer l’instabilité des prix.

La métaphore de l’or blanc pour parler du lait de vache, n’est vraiment plus de mise ! En août 2015, la cotation de référence du lait liquide s’établissait à 325€/t de lait cru standard (38 TB et 32 TP) en France alors qu’il culminait à 440 €/t début 2014. On pourra se consoler (ou non) en regardant nos voisins européens moins bien lotis : 285€ aux Pays-Bas, 280€ en Irlande, 278€ en Allemagne.  Cette volatilité n’arrange personne. Avec un prix qui frôle le plancher, même les éleveurs les plus robustes financièrement risquent gros. Le prix d’équilibre (prix nécessaire pour payer l’ensemble des charges de l’exploitation tout en rémunérant correctement l’agriculteur) est supérieur à 35 ct/kg pour de très nombreuses exploitations laitières, comme l’atteste le réseau Européen Dairy Farmers (EDF) qui présentait le 16 septembre au SPACE une synthèse des résultats technico-économiques issus des exploitations adhérentes.

Du pragmatisme à défaut de prix

L’obsession des membres EDF : améliorer la rentabilité des exploitations en tablant notamment sur l’émulation entre éleveurs adhérents de l’association issus du continent européen. Cette posture purement technico-économique peut susciter une certaine frustration chez les éleveurs qui se battent aussi pour que les décideurs européens imposent de véritables outils de régulation des marchés. Mais elle a le mérite du pragmatisme. Hermjan Darwinkel, éleveur laitier sarthois, acquiesce : « J’essaie de travailler au maximum sur les leviers que je maîtrise, de ne pas dépenser trop d’énergie sur le prix du lait parce que c’est comme la météo, je ne peux rien y faire, seulement m’adapter et anticiper. Je travaille sur un prévisionnel de trésorerie et je fais de mon mieux pour bien m’entendre avec mon banquier ! »
Mais comment nourrir des relations confiantes avec son banquier lorsque l’on est en situation financière délicate ? Le représentant du Crédit Mutuel, présent à cette rencontre, se veut malgré tout rassurant en plaidant l’anticipation : « Il est beaucoup plus simple de se mettre d’accord sur des leviers d’action avant d’être dans le rouge ! Moduler les échéances de prêt, adapter des mensualités d’emprunts aux fluctuations des paies est envisageable lorsque cela est discuté en amont. »  Trouver des solutions avec sa banque ou bien se comporter en fourmi les années de vaches grasses pour mettre de côté (sur un compte bancaire, ou sous forme de stock pouvant être rapidement transformé en liquidité) est de bon augure, mais cela ne suffit pas. Maîtriser les charges d’alimentation, réduire les frais vétos ou les charges de mécanisation sont incontournables aussi. Et pour se motiver, on peut jouer également cartes sur table entre éleveurs.

Patrick Kelly, éleveur irlandais

En Irlande, le prix de base est de 260 €/1000 l et 2016 s’annonce difficile. Pour garder sa trésorerie, un des leviers envisagés par l’éleveur est la vente de vaches pleines. L’idée maîtresse de l’exploitation : viser des coûts de production faibles en limitant le volume d’aliments achetés au profit d’une utilisation maximale de l’herbe. Autres pistes d’amélioration: plus de vêlages saisonniers au printemps (à la pousse de l’herbe), diminuer le taux de renouvellement (moins de vaches), solliciter davantage l’ETA (moins de matériels), contractualiser l’élevage de génisses, et … initier des associations avec d’autres agriculteurs, en matière de formations et d’informations. Patrick Kelly

Stephan Van Rumst, éleveur belge

L’exploitation de l’éleveur Stephan Van Rumst s’appuie déjà sur de bons résultats techniques et pour lui, la donnée prix du lait est importante (prix de base à 250 €) « mais la connaissance et la maîtrise des coûts l’est encore davantage ».
L’exploitation est confrontée aussi à un manque de main d’œuvre externe qualifiée. C’est pourquoi l’éleveur souhaite dans le futur proche réfléchir à la mise en place d’une équipe multidisciplinaire au service d’autres éleveurs, de manière à optimiser la production laitière des exploitations concernées. Cela pourrait se traduire par exemple par une offre de service à la carte, jusqu’à la réalisation d’audit (organisation du travail, cheptel, …).
Stephan Van Rumst