En Lot-et-Garonne, un projet de lac d’irrigation suscite la polémique

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En Lot-et-Garonne, un projet de lac d’irrigation suscite la polémique

Les gendarmes sont intervenus mercredi pour arrêter des travaux illégaux, menés par des agriculteurs en Lot-et-Garonne à l'initiative d'un projet controversé de lac d'irrigation, vieux d'une vingtaine d'années mais qui s'est récemment accéléré.

Tôt dans la matinée, plus de 300 agriculteurs ont empêché, sans heurts, une vingtaine de gendarmes d’apposer des scellés pour interdire l’utilisation d’engins de chantier destinés à creuser le « lac de Caussade ».

Ce projet de lac d’irrigation, dans la campagne de Pinel-Hauterive, à une vingtaine de kilomètres au nord-ouest de Villeneuve-sur-Lot, a pour but de créer une retenue d’eau de 920.000 m3 sur 20 hectares. Piloté par la chambre d’agriculture locale pour réguler le débit du cours d’eau Tolzac, il est destiné à l’irrigation agricole de 350 hectares d’une vingtaine d’exploitations.

Les agriculteurs locaux, qui en rêvent depuis 20 ans, n’ont pu acheter le terrain qu’il y a un peu plus de deux ans et sont prêts à le réaliser eux-mêmes. Ils ont même commencé à débroussailler et creuser le terrain. « Beaucoup d’agriculteurs et notamment des jeunes agriculteurs ont besoin d’eau », dit Patrick Franken, président de la Coordination rurale du département, qui voudrait développer la culture du maïs, du colza, des fraises…. Et « l’apport d’eau favorise la biodiversité », assure-t-il.

Mais le projet suscite l’opposition des associations écologistes comme la FNE (France Nature Environnement) et la Sepanso qui ont multiplié les recours devant les tribunaux. Ce « projet est destructeur pour l’environnement et surtout il ne va pas répondre aux besoins en eau des agriculteurs », affirme à l’AFP, Anne Roques, juriste à la FNE, « il est démesuré. Il n’y a pas assez d’eau dans cette région pour irriguer à profusion. »

L’Etat n’a pas aidé à résoudre l’imbroglio

Un premier arrêté préfectoral —immédiatement attaqué en justice — a autorisé le 29 juin 2018, les travaux et l’exploitation. Mais quelques semaines plus tard, les ministères de l’Agriculture et de la Transition écologique ont demandé au porteur du projet de « consolider son dossier », évoquant un « risque de recours contentieux (…) élevé ».

La préfecture a donc annulé, le 15 octobre, l’arrêté précédent avant une mise en demeure en janvier 2019, pour que les agriculteurs cessent des travaux qui se poursuivaient dans l’illégalité.

La quasi-totalité de la classe politique locale — sauf les écologistes — soutient la cause des agriculteurs.

Mercredi, les gendarmes, qui n’ont réussi qu’à installer un panneau avec le décret contesté, « n’ont pas pu poser les scellés mais nous avons privilégié le dialogue » et « évité l’affrontement », a assuré à l’AFP, la préfète Béatrice Lagarde. « Il ne s’agit pas d’une reculade de l’Etat », a-t-elle ajouté. Les gendarmes « reviendront jeudi vérifier que le décret est appliqué » et « si ce n’est pas le cas, nous aviserons des suites à donner à ce dossier, notamment judiciaires », a-t-elle assuré.