Le nouveau visage de la coopération de production

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Le nouveau visage de la coopération de production

Véronique Lucas a présenté en novembre à Dijon ses travaux de recherche sur les arrangements collectifs entre agriculteurs.

Adhérer à la cuma, faire partie d’une banque de travail, être membre d’un GIE d’achat, ou bien encore grouper le foncier en SEP, … de multiples façons de produire ensemble se développent. Elles remettent en cause les frontières habituelles de l’exploitation individuelle. Exemples.

Véronique Lucas est doctorante. Véronique Lucas, doctorante à l'INRA et à la FncumaDans le cadre de sa thèse entreprise en lien avec la Fncuma et l’INRA, elle planche sur le développement de la «Coopération agricole de production». Ce concept désigne l’ensemble des pratiques de coopération ayant pour objet la production agricole. Cela peut être des échanges de main d’œuvre, foncier, matériels, pratiques, savoir-faire, … entre exploitations voisines. Ceux-ci s’avèrent de plus en plus nombreux. Le phénomène tempère l’idée habituellement admise d’une montée de l’individualisme en agriculture. Ces combinaisons apportent un surcroît d’efficacité aux exploitations concernées et plus globalement à la dynamique du territoire agricole. Il s’agit d’arrangements collectifs entre pairs, souvent méconnus.

Complémentarité et réciprocité

Ces pratiques locales, basées sur la complémentarité et la réciprocité, peuvent être déterminantes pour la performance de l’exploitation. Elles apportent de la flexibilité et de la résilience à un environnement technique, économique et réglementaire très évolutif. Ces coopérations de proximité dépassent parfois le seul enjeu marchand de l’activité agricole. Exemple : les actions concertées entre agriculteurs, menées sur un bassin versant pour améliorer la qualité de l’eau, sont vertueuses pour l’ensemble du territoire concerné.

Prise en compte extérieure

Selon les cas, les acteurs économiques d’amont ou d’aval seront amenés probablement à prendre en compte la réalité de ces groupes d’exploitations dans leurs relations commerciales : achat,  contrat de vente, etc. Idem pour les  pouvoirs publics qui sont contraints de revoir leurs modes opératoires vis-à-vis de ces nouvelles formes d’agriculture de groupe. Exemple : la possibilité d’établir une déclaration PAC commune pour des exploitations ayant des assolements en commun. L’Etat a d’ailleurs fait un pas significatif dans la reconnaissance de ces collectifs d’agriculteurs en créant les GIEE qui «officialisent» les démarches collectives en matière agro-écologique. Cependant, pour s’inscrire dans la durée, ces croisements d’exploitations devront s’appuyer avant tout sur des relations équilibrées d’inspiration coopérative, gagnantes pour tous.

Quel accompagnement des groupes ?

Cette situation invite à revoir le mode de conseil en agriculture. Jusqu’ici, l’approche était surtout centrée sur l’exploitation. Le conseil doit dépasser cette seule focale en prenant en compte les interconnexions qui relient différents groupes d’exploitations sur le terrain. Des groupes qui sont souvent à géométrie variable, composés de membres distincts selon la nature des échanges.
Parallèlement, certaines des démarches collectives observées par Véronique Lucas apparaissent limite du point de vue réglementaire. Ces organisations demanderont donc peut-être une expertise juridique pointue. Elles nécessiteront aussi des besoins d’accompagnement nouveaux en termes d’animation, voire de gestion de conflits.