On exporte des produits bruts, on importe des produits transformés !

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On exporte des produits bruts, on importe des produits transformés !

La question de souveraineté agricole n’est pas exempte de paradoxes. On exporte des céréales mais on importe de la farine ou des pâtes. Et de plus en plus de poulets …

L’objectif de souveraineté agricole et alimentaire, brandi par le gouvernement suite aux crises agricoles de début de l’année, reste hypothétique. Le rapport sur le sujet remis le 31 mars, pointe même des reculs

« La France est souveraine en matière alimentaire et agricole, mais avec des zones de fragilité préoccupantes » Telle est la phrase introductive du rapport intitulé « Evaluation de la souveraineté agricole et alimentaire », publié le 31 mars. Le rapport dresse un bilan contrasté de la Ferme France sur l’échiquier mondial. Certes, sa réputation est celle d’une grande puissance agricole. Mais elle perd des plumes depuis quelques années.

Souveraineté agricole : des points forts

La France demeure exportatrice nette. Sa balance commerciale s’élève entre 7 à 9 Mds € par an. 20 % du volume de production agricole part à l’export. Elle occupe la première place mondiale pour la production de vin. Et la première place européenne pour la viande bovine. Elle est aussi le premier exportateur européen de céréales. Son taux d’auto-approvisionnement est supérieur à 95 % pour 19 filières. De plus, les exploitations françaises sont en moyenne un peu plus grandes. Ce qui présente un avantage comparatif dans la concurrence à l’œuvre sur les marchés mondiaux. Et les rendements en céréales sont parmi les meilleurs d’Europe.

Et des points faibles

La France demeure dans le même temps très dépendante aux importations de certaines familles de produits. Citons les protéines végétales utilisées pour l’alimentation animale. Les deux tiers sont importés. Notamment du Brésil et de l’Argentine. Idem pour les graines oléagineuses qui servent à la production de bio-carburants. Le tiers est importé, essentiellement d’Australie. Et que dire des engrais azotés et phosphatés dont 80 % viennent de pays hors de l’Union européenne ? Des pans entiers demeurent déficitaires : fruits, légumes, protéagineux. Alors que le solde commercial de certaines filières se dégrade : viande de volaille, blé dur, pommes de terre, …

Dans ce comparatif, un point se révèle particulièrement inquiétant : la dégradation de la chaîne de valeur. En clair, on exporte des produits bruts. Et en retour, on importe des produits transformés. « Les Français consomment de plus en plus leur viande bovine sous la forme de steaks hachés ou de viande transformée, plus majoritairement importée que des morceaux piécés » cite le rapport.

Autres  exemples :

  • La France est exportatrice nette de carcasses de porcs, mais importatrice de charcuterie.
  • On vend à l’étranger des produits laitiers riches en protéines (poudre), mais on importe des produits riches en matière grasse (beurre).
  • Nous sommes importateurs net de farine, pâtes alimentaires et semoule.

Coûts de main d’œuvre et pression sur les prix

Enfin le rapport explore les causes structurelles susceptibles d’expliquer la perte de souveraineté. Deux d’entre elles sont pointées. D’abord la guerre des prix pratiquée en France par les enseignes de la grande distribution, conjointement à la demande d’une fraction des consommateurs qui privilégient les aliments pas chers. Cette tendance est favorable à l’importation de marchandises moins onéreuses produites hors frontières. Citons aussi le poids des charges salariales qui renchérit les coûts de production pour certaines filières gourmandes en main d’œuvre.

Au final, cette recherche absolue de souveraineté peut paraître vaine à certains égards. Tant ce principe apparait contraire au dogme européen de la libre circulation des biens et des marchandises …

Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com.