Des projets agrivoltaïques à foison !

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Des projets agrivoltaïques à foison !

Au salon Tech Ovins à Bellac le 6 et 7 septembre, de nombreux exposants proposaient des installations agrivoltaïques.

Les énergéticiens sont de plus en plus nombreux à proposer d’installer des panneaux photovoltaïques dans les champs. Les perspectives de revenus, très supérieures aux productions habituelles, suscitent forcément beaucoup de curiosité !

Les opérateurs en énergie verte sont à la manœuvre. Avec un certain savoir-faire marketing, ils tentent de convaincre les exploitants agricoles d’installer des panneaux dans les champs. « On voit énormément de projets agrivoltaïques dans les campagnes », observait un responsable professionnel de Haute-Vienne rencontré au salon Tech Ovin le 6 septembre à Bellac. Sur son site, la Fédération française des producteurs agrivoltaïques, annonce pas moins de 1 000 projets en développement.

Jusqu’à 5 500 € par ha ?

La loi de mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables a délimité juridiquement cette activité. Et des décrets d’application à paraître en fin d’année devraient clarifier un peu plus la portée de cette loi. Dans l’instruction des projets, l’avis des CDPENAF (Commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers) est décisif. Plusieurs départements disposent déjà de chartes qui encadrent, avec plus ou moins de restrictions, les projets photovoltaïques au sol. Elles ont été adoptées sous l’égide des chambres d’agriculture.

Les perspectives de rentabilité soulèvent beaucoup d’intérêt chez les agriculteurs. Les loyers annoncés sont en effet très substantiels. « Héberger une ferme solaire et touchez une rente de 1 000 € à 5 500 €/an par hectare sur 30 ans sans aucun investissement » annonce la Société Ferme Solaire sur son site internet. « Les loyers sont de l’ordre de 1 000 à 3 000 euros en général » tempère la société Valorem qui exposait au salon Tech Ovin, aux côtés de nombreuses autres sociétés.

30 à 35 ans de durée de vie pour une centrale solaire

Beaucoup de critères peuvent faire varier les montants des loyers : la proximité du point d’injection, la configuration du terrain, le type et le nombre de panneaux installés en lien avec la surface de la parcelle.  En production ovine, les projets envisagés démarrent autour d’une dizaine d’hectares selon les responsables de la société Photosol. Les projets en production bovine et en production céréalière sont plus rares. Ils commenceront sur des surfaces de 25 ha pour les premiers. Et 50 ha pour les seconds, selon les responsables de cette société. À noter : la durée de vie d’une centrale solaire est de 30 à 35 ans, selon edf renouvelables, filiale du groupe EDF.

Dans la contractualisation tripartite entre le développeur, le propriétaire et l’exploitant, d’autres dépenses peuvent être prises en charge par l’énergéticien, telles que : l’entretien de la parcelle ou le financement d’équipements appropriés, l’abreuvement, la contention, l’ensemencement de la parcelle.

50/50 entre propriétaire et fermier

Cette ressource financière est à partager de manière égalitaire entre l’éleveur exploitant et le propriétaire des terres, selon les vœux de la Fédération nationale ovine (FNO). Les éleveurs ovins étant pas mal sollicités par les développeurs, la fédération s’est positionnée sur ce sujet. Elle défend des projets agri-solaires vertueux, où les éleveurs ne seraient pas lésés. Le manque à gagner pour les éleveurs concerne la perte des aides PAC sur les surfaces dédiées et le travail supplémentaire engendré par la présence des panneaux.

La perte potentielle de production d’herbe liée à la diminution de la photosynthèse reste à préciser. Les récents épisodes de grosses chaleurs donnent des arguments aux partisans de cette nouvelle filière. Le bien-être animal serait gagnant grâce l’ombre des panneaux. Selon la chambre d’agriculture de la Nièvre, qui a suivi un lot d’agneaux sur une centrale, la productivité ne pâtirait pas de la présence des panneaux. Ils seraient même plus lourds de 3 kg en moyenne au sevrage. La société Valorem a mis en service en avril 2023, une plate-forme expérimentale de 250 kWc avec des essais des cultures de fourrage et autres végétaux. Un suivi agronomique réalisé par l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) permettra de capitaliser des références techniques robustes.

Beaucoup d’éléments à discuter

Entre agriculteurs et développeurs, beaucoup d’éléments sont à approfondir. Comment répartir les investissements ? les tâches ? les responsabilités ? « Il faut également anticiper les incidences directes et indirectes sur l’exploitation, telles que le régime fiscal (CSG et RDS) », précise François Vannier, éleveur ovin en Haute-Vienne, lui-même porteur d’un projet. L’éleveur insiste aussi sur la nécessité de se faire accompagner pour sécuriser juridiquement ces types de contrats de droit privé. Tout en sachant qu’entre la prise de contact et la mise en service de l’installation, un délai de 5 ans sera nécessaire. Cela comprend : la signature de la promesse de bail, la conception de la centrale, les études diverses, le permis de construire, l’enquête publique, les signature d’un bail emphytéotique, la procédure de raccordement, la réalisation du chantier… Cela suppose que le développeur soit suffisamment solide pour mener à bien le projet.

François Vannier (au micro) porte un projet agrivoltaïque en Haute-Vienne. À gauche, André Delpech, administrateur à la FNO.

« L’agriculteur devra être associé étroitement à l’ergonomie des structures », insiste André Delpech, administrateur à la FNO. Il faut garantir le passage des animaux, éviter les blessures, permettre les interventions mécaniques (fauche, broyage, épandage) et faciliter la surveillance. Pour un élevage ovin, on recommande un espacement de 4 m entre les rangées et une hauteur minimale de 1,20 m sur la partie basse des panneaux. C’est nécessaire pour la surveillance quotidienne des animaux.

Encore des réticences

L’installation agrivoltaïque doit garantir que la production agricole soit l’activité principale de la parcelle. Mais comment assurer que cette production demeure significative pendant toute la durée du contrat ? Notamment en fin de carrière, quand l’éleveur souhaitera éventuellement lever le pied…  La profession agricole, globalement rétive au départ, évolue sur ce sujet. Toutefois, certaines organisations comme la Confédération paysanne, y demeurent opposées. Parmi les objections soulevées figurent l’impact paysager et la perte d’autonomie dans les pratiques agricoles. Mais aussi l’impact potentiel sur les prix et la disponibilité du foncier au regard des « rentes foncières » promises.

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