Les cuma en plein virage numérique

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Les cuma en plein virage numérique

Christophe Perraud intervenait lors des Controverses de Marciac, lors d'une table-ronde sur le thème de « Biotechs, ubération et robots agricoles en débats ».

Des menaces pour les cuma, le numérique et l'ubérisation ? A la réflexion, pas tant que ça, pour cet écosystème dans lequel l’usage prime sur la propriété. Sur le terrain, on commence déjà à imaginer plus loin et plus fort, comme l’indiquait Christophe Perraud lors des Controverses de Marciac*.

Il y a d’abord eu une courte phase de stupeur, se remémore Christophe Perraud, secrétaire général de la Fédération nationale des Cuma. Notamment lors du Congrès des cuma 2016, au cours duquel les représentants du réseau ont été aiguillonnés par le thème choisi, le numérique.

Aujourd’hui, pointait Christophe Perraud lors des Controverses de Marciac, sur le terrain, l’heure est plutôt à l’expérimentation. « Nous sommes clairement dans une phase d’appropriation d’un outil de plus, dans un environnement « Cuma » plutôt technophile. » Les applications sur mobile, par exemple, sont entrées dans les mœurs, comme pour les services de réservation en ligne sur le réseau Cuma.

Fondamentaux solides en cuma

Plusieurs initiatives sont en cours, touchant aux fondamentaux des cuma: « Nous avons établi au niveau national un partenariat avec une start-up, Karnott, qui a conçu un outil de calcul des charges de mécanisation grâce à un boîtier connecté embarqué. Il permet de relever les temps de fonctionnement, le suivi du parcellaire, etc. avec une connexion directe au service comptabilité, facilitant ainsi la facturation. »

« Les cuma sont déjà davantage dans l’usage que dans la propriété, précise Christophe Perraud. Concrètement, l’ubérisation, ce sont des plateformes numériques qui mettent en relation offre et demande. Pour nous, cela constitue un levier de développement, même s’il y a encore des aspects à clarifier. Nous avons les bons fondamentaux : le partage et la mutualisation pour se donner les moyens d’avancer, prendre des risques calculés… tout cela constitue quand même l’ADN des cuma. »

Pour le moment, sur ce qui reste le cœur d’activité des cuma, les machines, le phénomène l’ubérisation reste assez ponctuel, note-t-il, même si un partenariat a déjà été établi entre la plateforme VotreMachine.Com et la fédération des cuma Landes-Béarn-Pays Basque.

« Finalement, l’ubérisation vient catalyser des réflexions qui se posaient déjà au sein du réseau cuma: la nécessité de proposer des solutions souples pour prendre en compte à la fois des exploitations qui doivent évoluer pour survivre, et des palettes de modes de productions de plus en plus larges », analysait-il encore.

« Nous refusons le terme de « clients » pour nos adhérents, qui restent partie prenante des orientations dans les cuma, réaffirme Christophe Perraud. Mais si elles veulent rester dans la course, il va tout de même falloir approfondir deux notions, déjà développées dans certains groupes : rester à l’écoute des besoins des agriculteurs et leur proposer des services adaptés. »

Finalement, cela revient à « ne pas se contenter d’une gestion « statique » des adhérents autour de matériels. C’est cette souplesse qui leur donnera envie de rester dans les groupes, pour améliorer encore les chantiers, travailler sur de l’emploi, etc. » Au final, il faudra bien résoudre la quadrature du cercle et trouver un position d’équilibre entre souplesse et engagement coopératif.

Territoires d’innovation inexplorés

Reste que ça bouillonne un peu dans dans tous les coins du réseau : la notion de collectif est encore peu intégrée par les acteurs de l’ubérisation, analyse Christophe Perraud. Si ces modes d’intermédiation permettent de raccourcir la chaîne des relations entre agriculteurs, avec les fournisseurs, etc, cela peut être positif. Un autre élément intéressant concerne les relations entre les agriculteurs et les citoyens, usagers et consommateurs, au niveau d’un territoire.

En résumé, cela constitue une excellente opportunité pour les cuma : « on peut imaginer des plateformes pour se mettre en relation sur des projets. L’amont, dans l’agriculture, a déjà été organisé, mais il reste beaucoup à explorer dans le domaine de l’aval, y compris dans le lien avec les collectivités, sur lequel nous avons déjà pas mal d’acquis. »

Le réseau Cuma de l’Ouest de la France proposera d’ailleurs lors du Salon national des cuma, les 30 et 31 août à Lisieux, l’outil MyCumaLink : « destiné à rassembler les agriculteurs autour de l’usage de machines, il pourra rapidement se déplacer sur le terrain des projets agronomiques. Nous avons une vraie capacité à provoquer ces échanges, d’autant que les agriculteurs cumistes ont une vraie capacité à dépasser les obstacles et à construire des solutions. »

*Christophe Perraud intervenait lors des Controverses de Marciac, le 28 juillet dernier, aux côtés de Sylvain Doublet (Solagro), Frédéric Gérard (L’Avenir Agricole), Julien Reynier (coopérative l’Atelier paysan), Gaëtan Severac (Naïo Technologies), et Jacques Mathieu (directeur d’Arvalis) lors d’une table-ronde sur le thème de « Biotechs, ubération et robots agricoles en débats »