Comment facturer la moissonneuse-batteuse?

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Comment facturer la moissonneuse-batteuse?

Dans le cas général, le coût de la moisson est maîtrisé dans les campagnes et facturer à l'hectare ou à l'heure sans distinction des options, des équipements... reste une approche satisfaisante.

Répartir les charges liées à la moissonneuse entre les adhérents de la cuma se fait en fonction du volume d’utilisation de chacun. Mais quelle unité choisir : heure ou hectare ?

Qu’elle définisse une surface réalisée ou qu’elle représente un temps passé, les cuma ont tendance à se référer à une unité simple pour établir la facturation d’utilisation de la moissonneuse-batteuse. «Chez nous, c’est à l’heure dans 95% des cas», pose un animateur du réseau cuma en Vendée. «Ici, et contrairement à l’ensilage où les groupes vont parler en heures un peu plus qu’avant, à la moisson, nous restons surtout sur les hectares», répond un autre expert du réseau, cette fois dans le Grand Est.

Les deux systèmes ont leurs avantages et inconvénients. De plus, ce qui compte réellement pour l’agriculteur, «c’est le montant de la facture finale», reprend le vendéen Éric Canteneur. En outre, quelle que soit l’unité de facturation prise en compte, «le plus important, c’est que tout le groupe soit d’accord sur la méthode de calcul».

L’animateur illustre le genre de limites que les différentes possibilités peuvent avoir. «Par exemple, travailler à l’hectare pousse à en faire le maximum dans la journée, en cherchant la vitesse notamment. Une dérive possible que l’on constate dans ces cas-là est d’aller aux limites de la qualité du travail.» Selon lui, un coût unitaire défini à l’heure, «pénalise les adhérents qui ont un parcellaire moins favorable».

Facturation de la moissonneuse-batteuse: la simplicité reste un bon compromis

Dans ces conditions, ne serait-il pas pertinent de faire évoluer les calculs vers d’autres unités? Voire de combiner des indicateurs afin de tendre vers l’équité parfaite? «C’est sûr, on peut partir sur les hectares, appliquer un coefficient différent pour chaque culture», et pourquoi pas pondérer aussi selon le nombre de tonnes qui passent par la trémie? «Pour ceux qui ont un bon tableur Excel et qui aiment ce genre d’exercices, ça peut-être ça la caricature », sourit l’animateur dans le Grand Est, Éric Aubry.

Comme son homologue, il constate cette appétence des responsables d’activité moisson pour les calculs simples. Et bien leur en prend. En effet, «ce ne serait pas trop pertinent d’aller vers ce niveau de complexité pour établir la facturation de la moissonneuse-batteuse. Car, aujourd’hui, il n’y a pas d’enjeux extraordinaires sur les coûts de moisson». Certains groupes visent au maximum le critère économique, d’autres mettent le curseur vers plus de sécurité ou un peu plus de luxe. Ces choix de politique créent «des écarts, c’est vrai, mais ils restent dans le domaine de l’acceptable. C’est très différent du poste traction, par exemple.»

Le coût de la moisson? Un paramètre maîtrisé

Si, dans la pratique, cette question de compter en hectares ou en heures présente donc un impact relatif, elle devient néanmoins essentielle dès lors qu’il est question de se lancer dans un travail d’analyse des coûts. « Pour comparer aux références, je refais toujours les calculs à l’hectare», illustre Éric Canteneur. Ce genre de gymnastique devient aussi incontournable lorsque des cuma entendent se partager l’usage d’un automoteur alors qu’elles se situent sur des territoires très différents en termes de climat, de topographie… et donc de débits des chantiers.

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La diversification des productions apporte de l’incertitude et donc des questions

L’offre qui s’enrichit en possibilités techniques, voire technologiques, aussi bien que l’évolution des exigences des agriculteurs laisse néanmoins entrevoir que ces fonctionnements traditionnels pourraient évoluer. Mais dans des groupes «où l’on a des parcellaires homogènes, avec des assolements assez standards, dans des zones d’élevage, nous resterons sur des systèmes classiques», avec un automoteur et son parc d’accessoires, «géré de manière globale».

Mais dans d’autres endroits voués aux cultures, Éric Aubry observe que «la diversification des assolements qui est en cours apporte ce genre de questionnements». Faut-il une coupe flexible? Pour quelles cultures? et les autres doivent-elles financer la luxueuse option de la même manière? Faut-il multiplier des becs spécifiques par type de cultures et les facturer indépendamment?

Pas sûr que les moissonneuses continueront d’être toujours plus grosses

Le conseiller voit en tout cas du tri à faire entre les options qui auront finalement une incidence assez limitée sur le coût global de l’une ou l’autre des récoltes, et « les vraies différences technologiques qui justifieraient une vraie différence du tarif». Une certitude, le frein pour complexifier les calculs ne sera pas du côté de l’acquisition des données.

Il prolonge la réflexion: si les cultures se multiplient, que les besoins techniques se diversifient, «l’intérêt du groupe sera peut-être d’accéder à une diversité de solutions plutôt que de prioriser uniquement le débit avec un seul engin. J’ai déjà le cas d’une cuma qui amorçait le renouvellement d’une axiale par un modèle plus gros. Finalement, elle pourrait conserver sa batteuse et compléter avec une seconde avec batteurs.» Ainsi, son parc proposerait plus facilement diverses solutions face aux besoins variés que ses adhérents exprimeront à l’avenir.

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Facturation de la moissonneuse-batteuse: et pourquoi pas payer à la tonne récoltée?

Aucun ne doute que techniquement, pour beaucoup de groupes, il serait déjà possible (et très simple) de répartir les charges liées à la moissonneuse en fonction du volume qu’elle récolte chez chaque adhérent. Mais «l’heure ou l’hectare, c’est une unité qui parle à l’agriculteur quand il s’agit de payer pour la batteuse. Et ce n’est pas le cas avec la tonne récoltée», analyse Éric Canteneur.

Éric Aubry complète avec le fait que facturer selon ce critère ne serait pas plus équitable que les autres méthodes. «Par exemple, quand on va intervenir sur une parcelle en bio, avec un salissement important, que l’on doit être très attentif sur les réglages… On va passer beaucoup de temps alors que le tonnage obtenu sera plus limité que dans la parcelle de blé bien dressé à côté qui serait facile à récolter et avec un fort rendement.»


Rayons X

Cet article et ses données sont issus d’un travail d’enquête et d’étude économique publié dans l’univers Rayons X en Octobre 2021. Quatre moissonneuses-batteuses sont passées au scanner économique de la rédaction d’Entraid. Restez connectés, le dossier sera mis à jour tout au long du mois de novembre.