Pierre Brousseau est directeur d’Altéor Transaction, cabinet spécialisé dans les transactions en cas de transmissions d’exploitation agricole en Bretagne, Normandie, Pays-de-la-Loire et Poitou-Charentes. Il partage son expertise sur les différentes solutions existantes et leur mise en œuvre pratique concernant la transmission d’exploitation agricole.
Quelles sont les principales solutions de portage du foncier agricole dans les transmissions d’exploitation ?
PB : Aujourd’hui, en matière de portage de foncier, on a pas mal de solutions qui se présentent. Quand un agriculteur vend son exploitation, son outil de production (bâtiments, matériel, stocks et cheptel) est quasiment toujours vendu. Mais pour le foncier, on a dans un certain nombre de cas des agriculteurs vendeurs qui sont prêts à louer leurs terres par bail rural sur des durées qui restent à déterminer entre les parties.
Quand on a quelques propriétaires qui veulent vendre et que les surfaces ne sont pas trop conséquentes, on peut imaginer que le repreneur obtienne un financement pour acheter du foncier. Mais quand on se retrouve avec plusieurs dizaines d’hectares à vendre, dans des secteurs où le foncier peut parfois être un peu plus cher, la question du financement se pose réellement.
Pour y répondre, nous avons principalement trois solutions : le portage foncier par la SAFER, le recours à des membres de la famille (souvent à travers un GFA familial) pour participer au financement, et enfin, le recours à des investisseurs privés, qui est un peu moins fréquent. »
Comment fonctionnent concrètement ces solutions d’investissement privé ?
PB : On a des gens qui s’adressent à nous, souvent d’anciens agriculteurs à la retraite avec un peu de capital, qui sont restés relativement attachés au monde agricole. Ils sont intéressés pour investir une partie de leur patrimoine dans du foncier agricole. Ça nous arrive d’avoir recours à ces investisseurs privés qui achètent le foncier et font un bail à long terme à un jeune agriculteur.
Il y a un intérêt aussi fiscal et patrimonial à le faire, notamment des abattements sur les droits de succession qui sont relativement conséquents. C’est une formule qui permet au jeune de démarrer sans avoir à supporter immédiatement la charge financière de l’achat des terres.
La SAFER propose également un système intéressant : elle se substitue à l’acheteur, devient propriétaire, met en place une location, et il y a un engagement par le repreneur à acheter le foncier à horizon 5 ans ou 10 ans. Cela permet de louer dans un premier temps, ce qui allège la charge initiale, puis de devenir propriétaire quand on aura plus de capacité financière. Ça donne une visibilité sur une future propriété du bien. »
Quel rôle joue l’évaluation dans la réussite des transmissions d’exploitation ?
PB : L’évaluation est un enjeu très important. C’est une question qu’on se pose dès le début de nos accompagnements. On commence par faire un audit de l’exploitation : on la visite, on fait un tour des parcelles, on visite les bâtiments, on fait un tour du troupeau aussi. Puis, on collabore avec le vendeur pour savoir ce qu’il veut vendre, ce qu’il veut louer, ce qu’il veut éventuellement mettre dans la transmission, ce qu’il veut garder.
Il faut d’abord définir le périmètre de la reprise, puis on avance sur une proposition de valeur qui va tourner autour d’une double approche : une approche patrimoniale, c’est-à-dire qu’on va reprendre les biens un par un et essayer de leur donner une valeur vénale. Donc, on va arriver à une proposition patrimoniale de l’exploitation. Et puis on va également mettre cette évaluation patrimoniale en lien avec la rentabilité économique de l’entreprise.
Il faut que l’exploitation, il faut que sa rentabilité interne soit cohérente avec son prix de vente. On a besoin des documents comptables pour voir quelle est la rentabilité. Ça tourne beaucoup autour de l’EBE, de voir quelle est la capacité à générer de la trésorerie de la part de cette exploitation. C’est la position du repreneur et de son banquier de savoir quelle est la rentabilité permise par cette entreprise. Et c’est cette rentabilité interne qui permettra aussi de valider, ou pas, la valeur de cette exploitation agricole. »
L’importance de l’accompagnement dans la transmission
L’accompagnement par des professionnels spécialisés constitue souvent un atout majeur dans la réussite des transmissions d’exploitation agricole. Au-delà de la simple évaluation des actifs, cet accompagnement permet de résoudre de nombreuses difficultés qui peuvent se présenter :
- Maîtrise du foncier ;
- Fiscalité ;
- Démarches administratives ;
- Obtention des autorisations d’exploiter ;
- Qualité sanitaire du troupeau…
Ces missions, qui peuvent s’étendre sur plusieurs mois, nécessitent une expertise pointue pour franchir sereinement chaque étape et garantir l’aboutissement de la transmission dans les meilleures conditions, tant pour le cédant que pour le repreneur.
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