Un marché réglementaire du carbone inaccessible

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Un marché réglementaire du carbone inaccessible

" Les estimations de stockage dans le sol sont encore méconnues et cela varie selon le type de sol, le climat et les techniques de culture", Anaël Bibard, ofondateur de Farm Leap, plateforme de mise en réseau des indicateurs économiques et environnementaux des exploitations.

Pour vendre le carbone stocké ou non émis, il existe deux types de marché. Celui réglementé et celui volontaire. L’agriculture ne peut accéder qu’à ce dernier. Pour le valoriser au mieux, les acteurs de la filière travaillent à sa certification.

Vendre du carbone, pour un agriculteur, ça ne s’improvise pas. Cette marchandise, selon sa provenance, n’accédera pas à la même valorisation. Dans tous les cas, les crédits carbone doivent être certifiés avant d’arriver sur un marché. Tout d’abord, il y a le marché réglementaire européen. Celui n’est pas accessible aux crédits carbone issu des réductions des émissions de gaz à effet de serre des exploitations agricoles. « C’est un marché financier qui réagit comme la bourse, explique Anaël Bibard, cofondateur de Farm Leap, plateforme de mise en réseau des indicateurs économiques et environnementaux des exploitations. Selon les offres et les demandes, les prix du carbone vont varier. » Toutefois, il reste plafonné à 100 $ la tonne équivalent (teq) CO2 et avoisine les 72 $/teqCO2 en moyenne.

Réduire et compenser

Pour accéder à ce marché, les entreprises doivent être considérées comme « très polluantes », or ce n’est pas le cas de l’agriculture. Pour respecter leurs quotas de carbone qui leur est alloué, les pollueurs n’ont pas d’autres choix que de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre ou de les compenser. Et pour cela, elles vont se tourner vers le marché du carbone réglementaire pour acheter des crédits carbone.

Le second débouché, plus accessible pour les gaz à effet de serre évité des exploitations françaises, c’est le marché du carbone volontaire. Ici, ce sont des entreprises qui choisissent d’intervenir sur cette place pour acheter des crédits carbone. « On s’adresse clairement à des entreprises qui ont un excès de cash et qui ont une conviction écologique, ajoute Anaël Bibard. Elles font aussi ce choix pour des raisons marketing ou pour accéder à des prêts à taux bonifiés. »

Cinq critères pour valoriser le carbone issu des exploitations agricoles

Cependant pour vendre ces tonnes de carbone non émises ou compensées, celles-ci doivent être certifiées. À ce jour, il existe six labels à la disposition des exploitations qui permettent de certifier la qualité des gaz vendus. Selon leur niveau d’exigences et les méthodes, le prix du carbone sera plus ou moins élevé. Leur accessibilité diffère également selon le type d’exploitation.

Pour valoriser au maximum le carbone issu des exploitations agricoles cinq critères sont à retenir. Un tiers doit avant tout certifier les crédits carbone. Ensuite, il faut dater et maintenir dans le temps la réduction des émissions. Puis, tracer les crédits carbone et ne les vendre qu’une seule fois.

Enfin, “l’additionnalité” des mesures n’est pas possible. « Le fait de payer un crédit carbone doit avoir un impact, précise l’expert. C’est une notion très difficile à définir car il existe des primes filières, des primes environnementales qui ne seront pas prises en compte. »

Marché du carbone: difficile pour les agriculteurs

Ces exigences, en agriculture, sont très complexes à mettre en œuvre. Pour le moment, la modélisation des pratiques permet une certification.

« Les estimations de stockage dans le sol sont encore méconnues et cela varie selon le type de sol, le climat et les techniques de culture, regrette Anaël Bibard. L’évolution de ce stockage doit également être mesurée de manière précise. Il faut également prendre en compte que le stock de gaz à effet de serre est réversible. On ne manque pas de preuves que l’agriculture bas carbone fonctionne à l’échelle collective. On manque seulement de preuves à l’échelle de la parcelle. »

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