Moins de phyto, plus de résistances, le désherbage des céréales à l’automne devient un casse-tête pour les agriculteurs. Alors pas question de se passer de tous les leviers à actionner. L’agriculteur est aux manettes et il doit avoir en tête que la chimie ne vient plus à bout des situations difficiles. Lorsque les céréales sont semées dans des couverts végétaux, d’autres problématiques peuvent interférer dans les stratégies de désherbage.
Désherbage des céréales à l’automne : soigner son interculture
Pour éviter d’arriver aux situations extrêmes, l’objectif est de bien gérer l’interculture. Aucune plante ne doit monter à graines durant cette période pour éviter l’ensemencement future de la parcelle. Adventices vivaces et graminées doivent atteindre le stade des trois feuilles maximum sinon, après, il sera trop tard. Il faudra alors songer à les broyer trois semaines avant les semis. Toutefois, il faut être réaliste, qu’elle que soit la méthode, les ray-grass lèvent désormais toute l’année et restent difficiles à détruire.
Quant à la destruction de ce couvert, l’utilisation systématique du glyphosate peut entrainer des résistantes. L’intérêt donc de respecter les doses prescrites et le moment optimal de son application. « On constate une moindre efficacité du glyphosate lorsqu’il est appliqué à des moments où l’hygrométrie est trop faible, ou lorsque les doses sont peu élevées, assure dans une note Christophe Delye, chercheur à l’Inrae. Ce peut être le cas également lorsque les stades sont trop avancés ou les plantes peu poussantes. »
Ainsi, pour avoir une pénétration optimale de la goutte, l’hygrométrie doit être supérieure à 80% et une vitesse du vent inférieure à 15 km/h. Pour plus d’efficacité, il est possible de rouler le couvert entre deux heures et un jour avant l’intervention. Cette technique est toutefois plus efficace sur les dicotylédones que sur les graminées.
Bien traiter
Il va de soi que pour appliquer des herbicides racinaires, certaines précautions sont à prendre. « Le traitement doit intervenir sur les adventices jeunes ou non levées, rappelle Paul Robert, directeur de Novalis Terra dans une note de l’APAD. Le sol doit être travaillé finement et ne doit donc pas être trop motteux tout en restant humide. Il faut aussi limiter la présence de résidus pailleux. Ou tout du moins s’assurer d’une légère pluie ensuite pour que le produit s’infiltre dans le sol. Seuls 5 mm peuvent suffire.
» En agriculture de conservation des sols, le risque est que la matière organique en surface absorbe le produit, explique Mathieu Marguerie de chez Arvalis, dans cette même note. Effectivement, les résidus peuvent faire écran, surtout si la biomasse est estimée entre 4 et 5 TMS/ha. En revanche, s’il est réussi, le mulch peut limiter la levée des adventices. » L’art de bien jauger.
Pour assurer une bonne sélectivité du désherbant, la graine est idéalement implantée à, au moins 2,5 cm de profondeur. L’agriculteur peut rappuyer son semis dans des conditions sèches durant les 24 heures suivant l’application. La molécule ne doit pas être pulvérisée sur des cultures stressées, déchaussées ou en mauvais état végétatif, mais plutôt en conditions poussantes.
Désherbage chimique plus complexe
Toutefois, il faut être lucides, le désherbage des céréales à l’automne risque d’être de plus en plus complexe. Faute de matières actives sur le marché. À l’image du flufenacet qui ne sera plus commercialisé d’ici décembre et interdit d’utilisation fin 2026. Quant à la pendimethaline, il faut être vigilant aux restrictions d’usage. Tout comme le prosulfocarbe qui est très volatil.
« L’acloduo est plutôt bien efficace sur les ray-grass et sur les vulpins à une dose de 1,2 l/ha, constate Paul Robert. Toutefois, il faut être assez réactifs, car il faut l’appliquer en post semis, pré-levée ou post levée jusqu’à trois feuilles. » Bien sûr, il convient de respecter les restrictions d’usage avec une ZNT de 20 mètres, les restrictions sur sol drainé et ne pas le pulvériser plus d’une fois dans la campagne. « Les agriculteurs européens attendent un nouveau produit, déjà homologué au Royaume-Uni, le Luximo qui semble prometteur et à appliquer en post levée précoce », annonce l’expert.
Adopter une stratégie globale
Toutes ces préconisations sont à contextualiser dans une stratégie globale. En effet, le désherbage chimique est combiné à d’autres leviers. À l’image de la rotation qui permet de décaler les dates de semis et les espèces. Cela perturbe les adventices et permet de varier les désherbants chimiques. Le choix de variétés vigoureuses ou une augmentation de la densité de semis peuvent être des stratégies judicieuses.
Semer les céréales sous couvert peut éviter de lever la dormance des graines d’adventices. Mais pour cela, il faut semer à petite vitesse (moins de 5 km/h) dans un couvert suffisamment dense pour éviter la lumière. Dans ce cas, il faudra privilégier les semoirs à disques plutôt que ceux à dents. Le désherbage des céréales à l’automne devient un casse-tête !
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