Les 6 pires erreurs de gestion dans la conduite d’une cuma

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Les 6 pires erreurs de gestion dans la conduite d’une cuma

Passer insuffisamment de temps à réfléchir au projet d’investissement fait partie des erreurs de gestion les plus fréquentes.

Daniel Desruelles, directeur de la Frcuma Hauts-de-France fait part des erreurs de gestion qui lui semblent les plus problématiques dans la conduite des groupes.

SOMMAIRE

Certaines erreurs de gestion reviennent souvent dans les cuma. Dans les Hauts-de-France, Daniel Desruelles a une connaissance étroite du réseau des cuma et des dysfonctionnements les plus manifestes de certaines. Il dresse l’inventaire des erreurs de gestion les plus préoccupantes à ses yeux.

1 – L’inadéquation entre la durée d’amortissement et la durée de financement

Souvent lors d’un investissement, les responsables de la cuma réfléchissent d’abord sur l’emprunt nécessaire et les remboursements d’annuités auxquels la cuma devra faire face. À partir de là, ils déterminent le prix qu’ils devront facturer pour couvrir au minimum l’échéance. Or ils devraient plutôt inverser le raisonnement, en calculant d’abord la durée d’amortissement du bien. Celle-ci peut être différente de la durée d’emprunt. On peut moduler la durée de l’une ou l’autre en fonction de l’investissement (type de matériel, niveau d’utilisation). La cuma peut ainsi négocier une durée de prêt différente de celle que propose la banque. En fonction de la durée de détention envisagée et de la valeur vénale du bien au moment de sa revente, on déterminera le montant des charges d’amortissement annuelles prises en compte dans le calcul du coût de revient.

L’objectif est de viser l’équilibre comptable. Cette donnée est importante. En effet, la cuma doit éviter de réaliser trois exercices consécutifs déficitaires (sous peine d’être soumise à la révision coopérative). Et elle doit, autant que faire se peut, éviter les moins-values ou les plus-values au moment de la revente du bien, qui rappelons-le ne sont pas redistribuables.

2 – Céder aux offres de prêts à taux bradés…

Pour appâter les clients, certains vendeurs proposent des offres commerciales avec des financements à taux « 0 » sur des durées courtes. Alors qu’actuellement les taux d’intérêt bancaires remontent (4,80 % sur 10 ans pour les prêts Agilor), cela peut naturellement susciter l’intérêt des cuma acheteuses. Mais, cela peut les entraîner aussi dans de graves difficultés de trésorerie. Précisons que la première échéance de remboursement de prêt doit intervenir de préférence après la première saison de travail, et non pas dès la livraison de l’outil.

3 – Garder un matériel trop longtemps

Garder un matériel sur une durée excessivement longue expose la cuma à des frais croissants d’entretien et de réparation. Mais le principal risque encouru est l’indisponibilité du matériel lors de la réalisation des chantiers. Ce préjudice peut générer des tensions dans le groupe.

Sur ce sujet, deux alternatives s’offrent aux cuma : soit elles procèdent à une remise en état complète du matériel en morte saison, soit elles renouvellent sans attendre le matériel vieillissant.

4 – Mal gérer les impayés

Rappelons que ce risque ne concerne pas les banques qui n’ont jamais perdu 1 centime dans une cuma ! J’observe que le risque d’impayés concerne paradoxalement des cuma riches qui sont parfois trop complaisantes avec les adhérents en retard de paiement en leur disant : « vous paierez plus tard, ce n’est pas trop grave, on dispose de réserves sur le compte ! ». C’est ainsi qu’on voit des cuma avec des créances à près de deux ans.

Pour réduire la vulnérabilité des cuma sur ce sujet, on les encourage à mettre en place des systèmes de facturation par acomptes et des paiements par prélèvement automatique.

5 – Ne jamais faire d’excédents!

L’objet d’une cuma n’est pas de réaliser des bénéfices. Cependant, vouloir systématiquement facturer au prix coûtant est hasardeux. En effet, l’inflation actuelle des prix d’achat des matériels nécessite de faire évoluer dans les mêmes proportions les capitaux propres au regard des emprunts contractés.

Or, il y a trois façons de conforter les capitaux propres :

  • recourir davantage à la souscription de parts sociales,
  • capitaliser tout ou partie des subventions en réserves indisponibles (minimum 50%),
  • réaliser un peu d’excédent.

Si le projet de la cuma est de continuer à investir, il est nécessaire qu’elle conforte sa capacité d’autofinancement.

6 – Payer le matériel avant d’être livré

Attention à ne pas signer le bon de livraison du matériel avant que celui-ci ne soit effectivement livré. On a déjà vu lors d’un dossier de prêt Agilor, des cuma le signer par imprudence. Or, celles-ci n’ont plus de recours ensuite si la livraison ne s’avère pas conforme à la commande. Nous conseillons aussi à la cuma de différer de quelques semaines le paiement de la TVA facturée après la livraison. Cela lui donne un levier d’action près du vendeur pour l’obliger à respecter pleinement tous ses engagements. Cette disposition doit figurer toutefois dans les conditions d’achat conclues dans le bon de commande. Enfin, nous déconseillons aussi de couvrir le paiement de la TVA facturée lors de l’acquisition du bien, par l’emprunt moyen ou long terme dédié à l’achat du matériel. Le cas échéant, prévoir plutôt un prêt TVA court terme.

Daniel Desruelles, directeur de la Frcuma Hauts-de-France

Autres erreurs de gestion

  • Ne pas signer les bulletins d’engagement et ne pas les réactualiser à chaque renouvellement de matériel.
  • Passer insuffisamment de temps au sein de la cuma à réfléchir au projet d’investissement et à se mettre d’accord en amont.
  • Négocier seul avec un vendeur, l’achat d’un matériel pour la cuma. Chaque responsable étant lui-même agriculteur, cela pourrait susciter des malentendus dans le groupe, voire des soupçons de collusion d’intérêt.

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