Gestion du temps : comment reprendre le contrôle ?

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Gestion du temps : comment reprendre le contrôle ?

Le temps de travail des agriculteurs est extensible à l'infini et ils ont, de plus, de très grosses urgences liées à leur cœur de métier : la météo, les contraintes sanitaires, administratives, etc.

Gérer son temps de travail est compliqué. Beaucoup de responsables de cuma – et d’agriculteurs – perdent le contrôle de leur emploi du temps. Bonne nouvelle : ça se soigne. Mais pas de remède miracle, chacun est son propre médecin, même si vous pouvez vous faire aider. Le point avec Martial Grenouillet, du cabinet GW Conseil.

Vous ne parvenez plus à gérer votre temps ? Votre liste de tâches à effectuer semble infinie ? Vous pensez que tout est à la fois important et urgent ? Vous êtes donc agriculteur et sans doute aussi responsable de cuma.

Temps pro : à vous la balle

« Un agriculteur peut tout à fait travailler de 5 heures à 22 heures tous les jours, il y aura toujours à faire. Il lui appartient de décider de l’heure à laquelle il ou elle souhaite arrêter de travailler et de poser sa limite, pour se dégager du temps personnel et familial, résume Martial Grenouillet de GW Conseil, société spécialisée dans le management d’entreprises. Beaucoup des agriculteurs avec lesquels j’ai échangé lors de la formation [voir paragraphe « Formation des agriculteurs »] ne faisaient en effet pas la différence entre temps professionnel et temps personnel, souligne-t-il. C’est d’autant plus vrai lorsqu’ils vivent et travaillent sur l’exploitation familiale. »

 

Se ménager du temps en dehors du travail

C’est un rappel, mais il n’est pas inutile pour les agriculteurs : il est impératif de se ménager régulièrement des temps et des espaces complètement ‘hors travail’ pour souffler, prendre soin de soi et de sa famille. Car le fait de travailler en permanence ‘use’ la personne et les relations, alerte le consultant. Pour tenir sur la distance, à la fois personnellement et professionnellement, il faut donc organiser ces moments. « Cela nécessite de classer, hiérarchiser, prioriser les actions professionnelles pour dissocier l’urgent de l’important. Ce n’est pas la même chose, et cela permet de faire le tri, insiste monsieur Grenouillet.

Il est possible de se faire conseiller pour apprendre à aménager son temps de travail.

Martial Grenouillet de GW Conseil, société spécialisée dans le management d’entreprises.

Quitter le mode ‘pompier’

En gros, il s’agit de quitter le mode ‘pompier’, lorsqu’un agriculteur fait tout ce qui lui est présenté comme urgent. Les participants se sont rendu compte, en analysant une journée, qu’ils pouvaient traiter 25 éléments urgents mais pas importants. À la fin, ils s’aperçoivent qu’ils n’ont pas réalisé la seule tâche qui leur paraissait importante. ce qui génère du stress, et impacte la vie personnelle, appuie-t-il. À l’inverse, une tâche importante est une action qui va avoir une plus-value pour la structure. Et c’est ce critère qui va servir à orienter les priorités.

Hiérarchiser les priorités

La gestion du temps de travail des agriculteurs est un vrai sujet.

Identifier ce qui est moins urgent et prioriser les tâches permet de prendre du recul et d’évacuer du stress.

Pour dissocier l’urgent de l’important, je propose d’utiliser la matrice d’Eisenhower [voir ci-dessus], qui permet de répartir les actions en quatre catégories simples, et de décider de ce que l’on garde sur la liste, ce que l’on délègue, ce que l’on effectue maintenant ou plus tard. Cela nécessite d’anticiper, d’analyser, de prendre de la hauteur sur son travail et c’est déjà un premier pas très important dans la reprise en main. » À noter : la délégation est une réalité pour de plus en plus d’agriculteurs, qu’il s’agisse de transférer des tâches aux salariés de leur propre exploitation, de leur cuma (notamment avec le service complet et les branches groupement d’employeurs qui permettent au salarié de travailler sur l’exploitation d’un adhérent sans matériel de la cuma) ou bien de sous-traiter à des entreprises. «

Ni paillasson ni hérisson » : affirmez-vous !

« Les agriculteurs ont de très grosses urgences liées à leur cœur de métier : la météo, les contraintes sanitaires, administratives, etc. Mais je me suis rendu compte qu’ils absorbent aussi les urgences de ceux qui les entourent : les fournisseurs, les voisins, les livreurs, etc. Or ils n’ont pas à le faire, martèle le consultant. On peut aussi ajouter celles des adhérents de cuma le cas échéant. C’est une question de respect : vous avez vos priorités, et celles de votre interlocuteur ne sont pas toujours les vôtres.

Apprendre à dire non

Vous pouvez tout à fait discuter, reporter, demander à la personne de repasser plus tard ou de prendre un rendez-vous la prochaine fois. Il faut aussi responsabiliser ses interlocuteurs : si une personne vient à 11 heures pour quelque chose qui doit être terminé à midi, il aurait dû venir plus tôt. Ce n’est pas toujours à vous d’absorber l’urgence. Pour reprendre la main, il vous faut exprimer vos propres contraintes. C’est ce que j’appelle le ‘ni paillasson ni hérisson’ : ne pas se faire ‘marcher dessus’, sans pour autant être agressif. Ces attitudes, qui rejoignent la capacité à dire non et l’affirmation de soi (aussi appelée ‘assertivité’) sont tout aussi importantes au sein des groupes et des formes sociétaires d’exploitations. »

Formation des agriculteurs : pour 109 € versés, jusqu’à 2 250 € pris en charge

Martial Grenouillet, du cabinet de consultants GW Conseil, a animé à la demande la fédération régionale des cuma Nouvelle-Aquitaine une session de formation sur la gestion du temps et du stress associé, en plusieurs séquences, dédiées à tester les outils et solutions proposées par le formateur. Cette formation était prise en charge par Vivea (qui accompagne et soutient financièrement le développement des compétences des chefs d’entreprise agricole). Selon le rapport d’activité 2021 de Vivea : Près de 23 % des agriculteurs se sont formés en 2021 (contre 19,4 % en 2020).

  • La contribution annuelle moyenne en 2021 est de 109 € par chef d’entreprise agricole.
  • Le montant moyen de prise en charge Vivea est de 432 € par personne en 2021. Le plafond annuel maximum de prise en charge est fixé à 2 250 €. Il y a donc là un potentiel de financement largement inexploité.

Stress : évacuez en respirant

Martial Grenouillet a également travaillé avec les agriculteurs participants à cette formation dédiée à la gestion du temps et du stress associé à des techniques de respiration pour faire retomber ces pics d’angoisse. « Tous les participants ne sont pas réceptifs au premier abord, souligne-t-il. Il faut être capable d’un certain lâcher-prise. » Malgré tout, ces techniques ont l’avantage de ne rien coûter, d’être efficaces et simples à mettre en œuvre. Ces séquences peuvent calmer un épisode aigu mais n’agissent pas sur la source du stress, contrairement aux techniques de gestion du temps et des priorités.

Pour plus d’informations, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :

[Temps de travail] Côté responsables, des dépassements risqués

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