Quel était l’objet de votre test ?
Par cet essai, je voulais montrer l’intérêt d’optimiser le gonflage des pneus d’un tracteur et d’un outil tracté. Pour cela, j’ai testé différentes pressions sur un tracteur et une tonne à lisier lors d’un chantier d’épandage. La tonne de 16 m³ avec un pendillard de 12 m de large pèse de 11 t à vide jusqu’à 27 t lorsqu’elle est pleine. La charge est répartie de manière homogène sur les deux essieux. Le tracteur de 240 cv quant à lui pèse environ 12 t, plus 3 t de report de charge de la tonne à lisier : 10 sur l’essieu arrière et 5 sur celui à l’avant.
Comment avez-vous procédé ?
Une fois le convoi établi, j’ai différencié les réglages de pneumatiques entre la droite et la gauche. À droite, j’ai utilisé les pressions dites classiques. C’est-à-dire 3,40 bars sur les deux essieux de la tonne et 2,5 bars à l’arrière du tracteur contre 2 à l’avant. Puis j’ai optimisé ces pressions via le logiciel Terranimo. J’ai réduit à 0,8 bar la pression des pneus à l’avant du tracteur, avec 1,1 à l’arrière et 1,4 pour chaque essieu de la tonne.
Quels résultats avez-vous obtenus ?
Sans surprise, le côté droit du chargement est davantage marqué sur le sol. De ce côté-là, la surface de contact au sol était de 1,8 m² contre 2,3 m² à gauche. Une différence de tassement du sol estimée à 20 %. On note une contrainte de 2,14 bars sur le pneu avant droit contre 1,55 bars sur celui gauche. Pour la tonne à lisier, sur ses essieux, il y a quasiment un bar de différence entre la version optimisée et celle qui ne l’est pas. L’empreinte est plus intense et plus profonde du côté droit. Et il faut être vigilant dans ce cas, car un tassement prononcé au-delà de 50 cm de profondeur est irrécupérable.
Quelles conclusions peut-on tirer de cet essai ?
Il faut retenir que l’agriculteur doit tenter d’optimiser la pression des pneumatiques des chargements. Si l’agriculteur a l’impression de ne tasser les sols que sur une petite surface, il faut avoir en tête que cette zone est souvent tassée en profondeur. Dans ces situations, la correction via un outil ou les racines d’une plante est impossible. Je ne pense pas qu’il soit judicieux de sacrifier une partie de la parcelle à ce point.
D’autant plus qu’on tasse les sols bien plus qu’on en a l’impression. Selon la largeur de l’outil, l’agriculteur peut tasser jusqu’à 80 % de la surface. Le chantier le plus piégeux est le ramassage de la paille. Les agriculteurs n’ont pas conscience qu’ils tassent leurs parcelles sur des proportions importantes de surfaces, même si le sol paraît portant. Il est primordial de réduire la pression des pneus. Rouler avec un télescopique gonflé à 4 bars, c’est une catastrophe ! Ce n’est pas un engin adapté aux terrains.
Quelles mesures prendre ?
Dans un premier temps, prendre conscience et se sensibiliser au tassement des sols. Pour provoquer et illustrer mes propos, nous avons déterminé qu’en gonflant un pneu à 1 bar au lieu de 1,6, le rendement est supérieur de 4 % sur l’ensemble de la parcelle. Avec quelques situations de mesures et quantification, sur des chantiers d’épandages d’effluents d’élevages en conditions humides, on arrive à des valeurs encore plus élevées et qui se répercutent sur plusieurs campagnes.
Si les agriculteurs veulent optimiser le gonflage de leurs engins, ils peuvent s’appuyer sur les abaques des pneumatiques ou sur des logiciels tels que Terranimo pour connaître la pression des pneumatiques nécessaire pour tel chantier ou tel convoi. Que ce soit sur la route ou dans les champs. Ils peuvent aussi demander à leur concessionnaire, celui-ci doit être en mesure de répondre.

Benoît Brouant, chargé de missions à la chambre d’agriculture du Grand Est (©Entraid)
Pour aller plus loin ?
Les agriculteurs doivent inclure les pneumatiques dans la réflexion de leurs investissements. Cela doit se faire en amont. L’investissement dans le télégonflage est aussi une manière de s’impliquer dans la réduction du tassement des sols. D’autres solutions sont plus complexes à mettre en œuvre comme l’épandage « sans tonne » ou la décomposition des chantiers : une tonne à lisier légère et sur-dimensionnée en pneumatique reste dans la parcelle pour l’épandage, et le transport de la matière (de la ferme à la parcelle) est réalisé avec des ensembles de type routiers.
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