On croit connaître les débits de chantiers. Mais les connaît-on vraiment ? Outre les valeurs de débit de chantier agricole théoriques ou estimées au doigt mouillé, ne faut-il pas les mesurer réellement pour mieux comprendre l’activité, et l’ajuster ? Voire, en amont d’un projet d’investissement, pour le confirmer, et chiffrer un volume d’activité prévisionnel. Car les déplacements entre l’exploitation et les parcelles, et éventuellement la cuma, représentent des temps improductifs non négligeables.
Débit de chantier agricole : chiffrer les rendements sur 1600 ha
Pour y voir plus clair, nous nous appuyons sur l’expertise du service agroéquipement de la Fncuma. Ce dernier suit, avec l’appui des animateurs du réseau, une population de compteurs connectés associés à divers outils. Le but : chiffrer les débits de chantier agricole réels, en tenant compte des temps morts et des trajets sur la route. Une précision : l’enregistrement des surfaces prend en compte chaque séance de travail et non pas chaque parcelle, qui peut être travaillée en plusieurs fois.
Dans cette étude Rayons X portant sur les tracteurs de 180 ch, nous avons pris comme matériels témoins l’exemple d’un groupe de fauche de 10 m et d’un déchaumeur à disques indépendants de 4 m. Le premier a réalisé deux saisons de 587 ha. Le second a réalisé une saison de 1070 ha.

Débit de chantier agricole selon la superficie de la parcelle.
Un tiers du temps hors parcelle
Au total, le combiné de fauche a passé 68 % du temps en parcelle, et 32 % en dehors. Une proportion de deux tiers dans le champ et un tiers sur route et corps de ferme ! On décompte donc beaucoup de temps improductifs.
Côté trajets, l’attelage a dévalé exactement 642 km de bitume. Soit un peu plus d’1 km/ha fauché en moyenne. Le même raisonnement calculé en moyenne, mais pour chacun des chantiers, est moins flatteur, 2,4 km/ha travaillé. Cependant, cette performance n’est pas si mauvaise comparée à d’autres chantiers. Par exemple, au broyage sur notre étude de 2024 sur les tracteurs de 215 ch. Pour rappel, il ressortait 3,1 km de route pour broyer 1 ha.
Quant au débit de chantier, vu les temps morts, on peut supposer une mauvaise performance. Vérifions ! Il est mesuré à 3,1 ha/h en parcelle. Mais il chute à 2,1 ha/h avec les déplacements et les temps morts. Une perte de rendement significative.
Autre exemple de chantier, cette fois au déchaumeur DDI de 4 m. Premier constat, moteur allumé, tracteur et déchaumeur ont passé 25 % du temps sur la route. Pour au total 1360 km parcourus sur le bitume et les chemins. Soit en moyenne 1,3 km/ha travaillé. Le même calcul à la parcelle donne 1,9 km/ha. Si l’on regarde maintenant le débit de chantier, on obtient 2,85 ha/h dans la parcelle et 2,00 ha/h au total avec route et temps morts. Une évolution à -30 %. Une baisse de performance un tout petit peu moins sévère qu’au chantier de fauche décrit plus haut : -32 %.
L’enchainement des petites parcelles à optimiser
La logique veut que l’on perde moins de temps dans une parcelle grande et de forme régulière que dans une autre petite et « mal fichue ». Vérifions cela sur les campagnes de fauche avec le combiné de 10 m.
Pour les parcelles mesurant 10 ha ou plus, le débit de chantier en parcelle atteint 3,7 ha/h. La vitesse de travail moyenne mesurée n’est que de 6,4 km/h. Les parcelles aux tailles comprises entre 5 et 10 ha ont, elles, vues un débit de chantier de 3,5 ha/h. Pas si éloigné des grandes parcelles. La vitesse moyenne de travail baisse à 6 km/h.
Et pour les plus petites parcelles, de moins de 5 ha, le débit de chantier en parcelle tombe à 3,1 ha/h. Et la vitesse à 5,5 km/h. Ce qui n’est pas une chute spectaculaire.

Temps de travail dans la parcelle et en déplacement
Si on note donc bien une corrélation plutôt linéaire entre débit de chantier et taille de parcelle, la distance à parcourir montre une tendance plus brutale.
En effet, les données relevées montrant que le tandem tracteur – combiné de fauche parcourt en moyenne 3,2 km pour 1 ha travaillé de parcelles de moins de 5 ha. Quand il dévale 1,6 km/ha pour les parcelles de 5 à 10 ha, et 1,5 km/h pour les parcelles de plus de 10 ha.
Il faudra donc chercher à mieux raisonner l’enchainement des chantiers des petites parcelles ! D’autant que d’après d’autres relevés effectués sur le compteur connecté d’un combiné de fauche 10 m en montagne, le constat est le même. Pour réduire les coûts, il reste donc des marges de manœuvres pour mieux organiser les chantiers sur de telles activités.
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