Clothilde Tronquet, chercheuse volontaire à l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), répond aux questions d’Entraid à propos du système du marché carbone.
Qu’est-ce que les crédits carbone ?
On parle aujourd’hui plutôt de certificats carbone que de crédits carbone. L’idée est de garantir l’impact climatique d’un projet de réduction d’émissions ou de stockage de carbone.
En pratique, on simule deux scénarios d’émissions :
- un scénario introduisant des pratiques comme les couverts intermédiaires ou l’optimisation de la fertilisation ;
- un scénario maintenant les pratiques courantes de l’agriculteur.
La différence entre ces deux scénarios détermine le nombre de certificats qui sera généré après vérification par un auditeur externe.
Comment fonctionne le marché carbone ?
Il y a plusieurs marchés. Les marchés carbone volontaires, où les entreprises décident d’acheter des certificats dans le cadre de leur démarche RSE, afin de contribuer à la lutte contre le changement climatique. Il existe aussi les marchés réglementaires, où des acteurs sont obligés par la loi d’acheter des certificats.
En France, par exemple, les compagnies aériennes sont obligées de compenser les émissions des vols nationaux avec l’achat de certificats carbone, ce qui représente plus de la moitié des financements de projets certifiés français.
Comment évolue-t-il ?
Il ne faut pas attendre des miracles du marché volontaire. Aujourd’hui, l’offre est supérieure à la demande. D’ici à 2030, les prix devraient augmenter au niveau international, où il y a une pression très forte pour développer les projets de stockage.
En France, les projets ont du mal à trouver des financeurs, notamment les projets agricoles. Pour autant, la certification est un outil très utile pour s’assurer de l’impact positif d’un projet sur le climat. Au niveau français, une évolution de la demande réglementaire pourrait aussi changer la donne.
Quel potentiel pour financer la décarbonation d’une exploitation ?
Il y a une différence énorme entre le prix des certificats carbone et le coût réel des pratiques. En grandes cultures, un projet coûte en moyenne 100 € par tonne de CO2. De l’autre côté, le prix moyen des certificats est à 30 €.
Les euros restants pourraient être financés par d’autres moyens comme la mobilisation de l’aval des filières par exemple. Des soutiens publics pourraient aussi mieux accompagner les changements de pratiques.
Quelles évolutions sont attendues sur le marché carbone ?
En France, le Label bas-carbone, porté par le ministère de la Transition écologique, connaît des révisions importantes sur le plan méthodologique et réglementaire.
Au niveau européen, un nouveau standard est en cours de construction afin d’harmoniser les règles et de tirer vers le haut la qualité des certificats. De nouvelles utilisations pourraient émerger.
Par ailleurs, la question de la revendication fait encore débat. La clarification des règles d’attribution des certificats entre financeurs, agriculteurs et acteurs de la chaîne de valeur est nécessaire pour faciliter les financements.
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