Etats généraux: les agriculteurs veulent une loi pour améliorer leur rémunération

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Etats généraux: les agriculteurs veulent une loi pour améliorer leur rémunération

Dans le cadre des Etats généraux de l'alimentation, les syndicats agricoles ont réclamé une loi visant à garantir la rémunération des producteurs. Sur la sellette, les distributeurs mais aussi les consommateurs.

Combattre « le dogme du prix bas », « rééquilibrer les rapports de force »: les principaux syndicats agricoles ont plaidé mercredi, à l’Assemblée, en faveur d’une loi pour une meilleure rémunération des agriculteurs.

Egalement auditionnés par les parlementaires dans le cadre des Etats généraux de l’alimentation, les distributeurs ont affirmé être favorables à une évolution et jugé « intéressantes » les propositions de la FNSEA. « Nous appelons à un sursaut, c’est maintenant qu’il faut mettre les choses à plat », a déclaré Christiane Lambert, présidente du principal syndicat agricole.

La FNSEA était auditionnée par la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, avec l’ensemble des représentants agricoles, de l’agroalimentaire, de la distribution, et les associations de consommateurs dans le cadre des Etats généraux de l’alimentation.

Mme Lambert a appelé le Parlement à l’aider à lutter contre « le dogme du prix bas » dans l’alimentation, qui contribue à la crise de longue date que vit le monde paysan. « Il faut tenir compte des coûts de production franco-français et, ensuite, en confiance, retisser et reconstruire des prix en marche avant, entre les producteurs et les industriels, puis entre les industriels et les distributeurs », a-t-elle dit.

Il faut « convaincre les consommateurs que payer un ou deux centimes de plus sa tranche de jambon ou son litre de lait, c’est pérenniser des exploitations », a déclaré Mme Lambert, prenant l’exemple de la marque de lait équitable « C’est qui le patron ». Mardi, le ministre de l’Agriculture, Stéphane Travert, « a dit que beaucoup de choses dépendaient du consommateur », a-t-elle souligné. « Il y a aussi beaucoup de choses qui dépendent du législateur », a-t-elle ajouté.

Fin août, M. Travert avait admis que le gouvernement n’excluait pas « d’ajuster la loi LME » datant de 2008 qui régit les négociations commerciales entre distributeurs et industriels.

Désignant en creux la grande distribution comme principale responsable de la crise aigüe de l’agriculture, Mme Lambert a appelé les parlementaires à légiférer pour revoir à la fois, l’encadrement des promotions en grande surface, le seuil de revente à perte (SRP), les prix minimum, et les clauses de renégociation des contrats qui « ne sont pas appliquées ».

Le président de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), Jacques Creyssel, a reconnu que le système était « touffu, instable et pas forcément compréhensible ». Aussi, le représentant des principales enseignes de la distribution s’est dit « favorable à une évolution ». Pour lui, le système en place « favorise les grands industriels au détriment des PME » et contribue à affaiblir l’ensemble de la filière agroalimentaire.

C’est très chaud en ce moment

La Confédération Paysanne, classée à gauche, a également déploré le déséquilibre entre les parties prenantes aux négociations. « Le déséquilibre est tel entre nous, paysans, et le poids d’oligarchies de nos acheteurs, qu’il faudra passer par la loi pour qu’il y ait coercition et arriver à ce rééquilibrage des rapports de force », a estimé Cécile Muret, sa secrétaire nationale. Elle propose « une loi qui interdise l’achat en dessous des prix de revient des paysans et prenne en compte les coûts de production et un revenu minimum des paysans. »

« Dans notre pays, pour la formation du prix, depuis de nombreuses années, le dogme du prix bas prévaut », a déploré pour sa part, Mme Lambert. Selon elle, l’Observatoire des prix et des marges a chiffré à 1 milliard d’euros la valeur « détruite » sur la dernière année: « C’est un milliard de moins dans l’industrie agro-alimentaire, un milliard de moins qui remonte dans les exploitations agricoles. »

La Coordination rurale pour sa part demande aussi à ce que soit reconnue « la valeur du produit ». Mais elle met surtout en cause la politique agricole européenne qui « autorise » des « aberrations » dans la rémunération des paysans, selon François Lucas, président d’honneur du syndicat.

« L’agriculture, comme d’autres secteurs, peut s’enflammer, c’est très chaud en ce moment », avertit Mme Lambert.