Des ombrières pour les vaches, sous la forme de rangées de panneaux photovoltaïques, se dressent sur 0,5 ha dans une prairie de Jean-Simon Vuzé, à Champagné Saint-Hilaire (Vienne). À terme, ce démonstrateur fera partie d’un ensemble de 135 ha (pour une puissance de 100 MWc), réparti sur quatre communes et douze exploitations agricoles. Même si le projet a été conçu et présenté aux services de l’État avant la parution de la loi APER, il reprend bien son esprit, avec un taux de couverture voisin de 40 %. « L’objectif est d’instaurer une véritable co-activité, affirme Jean-Simon. Sous les panneaux, je ferai pâturer mon troupeau de vaches allaitantes. »
Les ombrières pour les vaches permettent aussi d’étendre la pousse de l’herbe
L’éleveur attend de l’aménagement un bénéfice technico-économique précis : « aujourd’hui, mes prairies sont à la peine en été, quand elles ne ressemblent pas à des paillasses. L’ombrage des rangées de panneaux devrait limiter les stress thermiques et hydriques. Cela étalera la production fourragère, y compris en période de chaleur, et supprimera l’affouragement en été. » Un potentiel entre-aperçu depuis une petite année d’installation du démonstrateur, qu’un protocole scientifique caractérisera.
« Nous avons conçu ce démonstrateur de façon à tester plusieurs paramètres, explique Lise Jaulmes, responsable agronomie chez Valeco, l’énergéticien auteur du projet. L’Idele y étudiera le comportement des animaux durant au moins d’un an. La chambre d’agriculture de la Vienne et l’Idele mesureront la production fourragère, en quantité et en qualité, pendant 3 ans. Nous nous appuyons sur l’expertise des Fdcuma de la Vienne et des Deux-Sèvres pour étudier la mécanisation sous les installations. Quant à Valéco, nous essayons plusieurs modalités pour définir les structures photovoltaïques les mieux adaptées à la cohabitation avec des bovins. »
Trois hauteurs d’ombrières pour les vaches à l’essai
Habitué à installer des panneaux photovoltaïques fixes, Valeco adapte ses façons de faire dans ses projets agrivoltaïques. Les panneaux sont rehaussés, trois hauteurs de bas de panneaux sont à l’essai : 1,8, 2,1 et 2,4 m. Tout est fait pour favoriser la déambulation des vaches : des ancrages monopieux remplacent les classiques bipieux, les renforts en croix de Saint-André sont rares et mis en hauteur, tout élément saillant (visserie, bouts de poutre…) est supprimé. Entre deux rangées, la distance entre bords de panneaux est de 6 m, et de 10 m entre les pieux. Les panneaux sont fixes : « Dans le contexte de production herbagère à Champagné Saint-Hilaire, c’est la technologie la plus robuste et la mieux adaptée au pâturage de bovins » estime Lise Jaulmes.
Des questions techniques posées par les ombrières pour les vaches
La présence de rangées de panneaux photovoltaïques sur plusieurs hectares pose des questions techniques. « Chez moi, les espaces sous ombrières seront pâturés, mais pas fauchés, annonce Jean-Simon Vuzé. Mais certains de mes voisins impliqués dans le projet auront peut-être d’autres pratiques. Ce qui est sûr, c’est que nous devrons adapter nos pratiques culturales pour ne pas nuire à l’intégrité des panneaux. »
Des achats de matériels spécifiques sont à l’étude. « Acheter en commun serait pertinent, analyse l’éleveur. Nous y réfléchissons actuellement avec les collègues. »

Lise Jaulmes, responsable agronomie chez Valéco, accompagne l’éleveur Jean-Simon Vuzé dans le suivi de l’installation agrivoltaïque.
Vers du partage de matériel spécifique entre agriculteurs
Par exemple, épandre du fumier et son lot de corps étrangers présente un risque pour les panneaux. Composter les effluents d’élevage puis les répartir avec un épandeur à table d’épandage pourrait être la solution. « Nous sommes conscients que la présence de panneaux photovoltaïques sur les parcelles peut nécessiter l’adaptation de certains matériels spécifiques, confesse Lise Jaulmes. C’est pourquoi Valeco fournira un soutien financier pour certains investissements. »
Valeco paiera un loyer de 3 500 €/ha/an, répartis à 50/50 entre le propriétaire et l’exploitant si ces deux personnes sont distinctes. Si un contrat lie l’énergéticien et l’éleveur concernant le démonstrateur, la nature des baux encadrant le reste du projet reste à définir.
« Je fonde de beaux espoirs dans ce projet, sourit Jean-Simon Vuzé. L’amélioration des performances fourragères valorisera mieux mes prairies et allègera ma charge de travail. Du point de vue économique, le revenu complémentaire versé par Valeco apportera une stabilité. Je voudrais que cela favorise l’installation d’un associé. Mon salarié partant bientôt à la retraite, il y aura de la place pour deux pour élever les 95 mères sur 295 ha, dont 170 de prairies. »

Un premier pâturage de 15 jours sous la structure s’est bien déroulé.
L’électricité produite valorisée en autoconsommation collective
Les planètes s’alignaient pour l’émergence du projet. En prospectant dans le civraisien, Valéco a trouvé quatre collectivités motivées pour accueillir une production d’énergie renouvelable. Les représentants des communes de Champagné Saint-Hilaire, Payroux, Château-Garnier, La Chapelle-Bâton ont aidé à identifier les agriculteurs de leurs territoires. Certains terrains du projet appartiennent à ces communes. Elles en seront donc actionnaires à 10 %. Une première étape dans l’acceptabilité du projet. Au gré des études environnementales, techniques et paysagères, le projet s’établit sur 157 ha, dans une concertation entre l’énergéticien et les agriculteurs. Ces derniers ont participé à des réunions de présentation du projet. Ils iront le soutenir devant la CDPENAF.
Valéco a choisi de valoriser l’électricité produite par le démonstrateur en autoconsommation collective. L’entreprise propose de la vendre à des usagers dans un rayon de 10 km, à 157,10 €/MWh TTC contre 201,6 en Tarif Réglementé de Vente (TRV). Cette proposition de tarif avantageux pourrait constituer un autre facteur d’appropriation du projet par les riverains. Le démonstrateur est raccordé au réseau depuis février 2025. Valeco et les communes impliquées initient actuellement la promotion de l’offre. L’éventuel surplus de production sera vendu sur le marché global. Il est prévu de faire de même avec la production du futur projet.
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