Tout collectif doit connaître son projet politique

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Tout collectif doit connaître son projet politique

Yves Cariou observe que les membres participent au groupe parce qu’il répond à leurs objectifs (©Oxymore).

Si l’idée s’habille de divers mots, « projet politique », « charte », « raison d’être » et qu’elle ne constitue pas non plus une obligation légale, elle est simplement un outil au service de la bonne gouvernance du collectif. Éclairage à propos de l’importance de fixer un cap à sa coopérative, avec Yves Cariou, agroéconomiste qui accompagne la prise de responsabilité dans le monde de l’économie sociale et solidaire.

Le projet politique n’est pas un vain mot. Certes, rien n’oblige la cuma à en déterminer un. Mais en permettant de fixer un cap, ce projet aide la gouvernance à prendre des décisions utiles au groupe à court et à moyen terme. L’agroéconomiste Yves Cariou apporte son éclairage sur l’importance d’avoir un projet politique pour la bonne marche des coopératives.

Entraid : En quoi fixer son projet est essentiel à la coopérative ?

Yves Cariou, Oxymore : Le principe d’une coopérative, ce sont des gens qui s’associent pour répondre à leur besoin. Il y a une idée de changer le monde, donc cette structure a un but. Celui-ci doit être clairement établi. Dans la mesure où la coopérative est là pour agir au bénéfice des membres, les participants ont intérêt à être d’accord sur ce qu’ils font ensemble.

Comment définir son projet ?

Si toutes les structures doivent se donner un projet, les ressources que l’on active pour ce travail de définition peuvent diverger. Tous les collectifs n’auront pas la même réponse. Et pour une cuma, on peut très bien se mettre autour d’une table avec un café pour rédiger sa feuille de route. Sans que ce soit qu’une question de taille, il n’y a pas vraiment de méthode universelle. Pour des structures plus complexes comme une fédération nationale, la méthode sera forcément un peu plus lourde. Dans des petites structures, il est vite possible de lister les participants qui s’impliquent et de voir individuellement quels intérêts a le groupe à ce qu’ils viennent et réciproquement, puis évaluer comment mettre en place la relation au regard de ces intérêts réciproques.

Quoi qu’il en soit, le résultat, c’est une vision commune, qui peut intégrer le souhait d’installer des jeunes, ou de répondre à tous les adhérents… On l’écrit sur un papier, en préambule des statuts, par exemple.

Que fait on de ce papier ?

Le projet politique, c’est un outil d’évaluation de l’action commune et des décisions des responsables. C’est cela qui donne un cadre à l’action du groupe que l’on constitue. Sans ce cadre, comment évaluer l’intérêt de la coopérative ? Cela doit servir au collège des sociétaires dont un des rôles est de vérifier que les administrateurs font bien leur travail, dans le sens de l’intérêt de l’entreprise coopérative.

Ce projet est-il immuable ?

Non. Quand on a créé une cuma il y a quarante ans, c’était pour répondre à un besoin précis. L’agriculture, le contexte, le monde… ont changé. Les façons de travailler et les gens aussi. Le renouvellement des générations s’accélère. De plus en plus de cuma s’en inquiètent. Le changement climatique ou la géopolitique, notamment, pèsent sur notre agriculture. Donc les raisons qui poussent à travailler ensemble, qui poussent vers la cuma en 2023, ne sont plus obligatoirement les mêmes. D’où l’importance de redéfinir assez régulièrement son projet politique pour identifier les nouveaux objectifs. À l’extrême, s’il n’y en a pas, il n’y a plus lieu d’aller vers le collectif.

Pour autant, le projet politique, qui se construit à l’échelon de l’assemblée générale des sociétaires, doit être stable. Si on doit le rénover très souvent, c’est que l’on s’est sans doute trompé au départ. Une périodicité de 5 à 10 ans semble correcte. Pour moi, qu’un collectif agricole adapte la refonte d’un projet politique au calendrier de la PAC semble une bonne idée.

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