Automnes humides : prévenir le tassement des sols en Normandie

Évaluer les conséquences d’un automne très humide sur les sols normands

Jean-Philippe Chenault, Chambres d’agriculture de Normandie

Publié le 5 février 2024

Mis à jour le 23 janvier 2024 à 17:58

Avec le changement climatique, les automnes très pluvieux deviennent plus fréquents, une adaptation des pratiques culturales sera nécessaire (©Ronan Lombard).

La Normandie a des sols avec de forts potentiels agronomiques, mais souvent très fragiles et sensibles aux problématiques d’érosion et de tassements. Connaître les solutions préventives et apporter des corrections deviennent des enjeux d’autant plus lourds que le climat évolue. Le dernier automne laissera des traces d’un point de vue agronomique, et donc économique.

Le tassement des sols est une problématique importante en Normandie. Les terres normandes sont fertiles mais fragiles. Avoir des terres limoneuses est certainement une chance d’un point de vue potentiel et facilité de travail du sol… mais cela se complique à l’automne. La bonne capacité de rétention de l’eau des limons est avantageuse en période sèche et de besoins des plantes importants. Mais en période très pluvieuse, comme cet automne 2023, ils se gorgent d’eau. Ils deviennent alors peu portants et sensibles au tassement. Cela ne s’est pas amélioré au fil des décennies particulièrement dans les systèmes sans élevage. Les matières organiques des sols (MOS) sont au cœur de la fertilité des sols. Elles interviennent sur la fertilité chimique, biologique, mais aussi sur le volet physique. La stabilité structurale des sols face aux phénomènes de battance, d’érosion et de tassements est pour partie influencée par la teneur et la qualité des MOS. Les argiles souvent plus riches en MOS ont une meilleure faculté à se « restructurer » avec les phénomènes de retrait et gonflement, mais cela ne suffit pas pour compenser les accidents de structure. En résumé, augmenter les taux de MOS (grâce aux couverts végétaux, fumiers, composts, à l’enfouissement de résidus de cultures…) est un enjeu important.

Des cultures sensibles, voire très sensibles au tassement des sols

La diversité des sols, des climats et des filières permet à la région d’avoir une grande diversité des cultures. Reste qu’une très grande majorité d’entre elles est impactée par les effets négatifs du tassement : exploration racinaire limitée, donc moins d’éléments nutritifs, disponibilité en eau réduite en été, et à l’inverse des risques d’hydromorphie. Les cultures industrielles comme les betteraves, les pommes de terre, le lin sont parmi les plus sensibles : Des pertes de rendements de plus de 30 % s’avèrent sur ces cultures à forte valeur ajoutée. Le maïs, plante particulièrement présente sur le territoire normand, est également sensible aux problèmes de structure. Dans ce cas, les impacts peuvent être lourds de conséquences sur l’élevage et son stock fourrager.

Récolte (ensilage) de maïs en octobre dernier dans le Calvados. Peu d’ornières, mais un tassement marqué sur 20 cm (© chambres d’agriculture de Normandie).

Du lourd, du trop lourd…

Au cours de ces dernières décennies, le machinisme a connu un développement très important dans la sophistication des équipements et dans les débits de chantiers. Cette évolution s’est accompagnée d’une augmentation des largeurs de travail, des capacités, et in fine des poids. La conséquence, c’est la contrainte au sol qui augmente car la pression au sol via les roues ou les chenilles en dépend directement. Même si les pneumatiques ont évolué, la charge par roue et son contact avec le sol reste l’interface risquée à mieux appréhender… donc attention aux poids des engins de travail du sol, d’épandages et de récoltes, surtout en conditions de sols trop humides.

Prévenir, identifier et corriger le tassement des sols

Les conditions d’humidité des sols doivent être un élément important dans la décision d’intervenir dans une parcelle pour ne pas dégrader la structure. Le rôle primordial des MOS et l’intérêt des couverts végétaux et des produits organiques est de plus en pris en compte. Établir un diagnostic est primordial : tests bêches, pénétromètre et mini-profil 3D sont des outils utiles et faciles à mettre en œuvre. Agrotransfert a réalisé de nombreuses fiches très utiles à ce sujet. Une fois la zone tassée évaluée en termes de profondeur, le choix de l’outil sera important (labour, fissuration, sous solage…). Au-delà de l’outil, les conditions d’humidité du sol sont cruciales.

Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :

Tel le Mécalive du 16 mai 2024 en Seine-Maritime, des événements portés par le réseau cuma en partenariat avec les chambres d’agriculture de Normandie s’organisent et aborderont ces sujets. N’hésitez pas à venir échanger sur ces questions.