Faut-il mettre de l’engrais sur son blé cette année ?

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Faut-il mettre de l’engrais sur son blé cette année ?

Lorsque l'engrais est cher, le plus gros levier à actionner reste les réglages des distributeurs d'engrais pour le répartir de manière homogène.

Avec des prix de céréales bas et des engrais chers, la question vient tout de suite en tête, faut-il revoir sa stratégie de fertilisation azotée pour la prochaine campagne ? Éléments de réponse avec Grégory Vericel, ingénieur chez Arvalis.

Engrais chers, blé bradé, les agriculteurs peuvent se demander s’il est bien raisonnable de fertiliser ses blés aux doses habituelles. Et même si les engrais n’ont pas atteint les niveaux de prix de ceux de 2022, à 1,50€/ kg d’ammonitrate et 1,20 €/kg d’urée ou de solution azotée, la question reste légitime. Quelle stratégie adopter quand le prix de l’engrais est élevé ? Grégory Vericel, ingénieur chez Arvalis essaye d’y répondre.

Quelle stratégie adopter quand le prix de l’engrais est élevé ?

Dans un tel contexte, on ne peut que conseiller aux agriculteurs d’être précis dans leurs méthodes de calculs de doses à apporter et de s’appuyer sur des outils et même des outils d’aide à la décision si nécessaire.

En ce moment, l’agriculteur a tout intérêt à bien évaluer l’azote présent dans le sol. Il faut avoir en tête également que ce sont les premières unités d’azote qui permettent de bien faire pousser la plante, obtenir des quantités suffisantes de grains. Les dernières sont utiles pour la qualité et l’obtention d’un taux de protéines nécessaires.

Il est toujours nécessaire de fractionner les apports et de favoriser ceux qui sont les plus efficaces.

À quel moment la plante est le plus demandeuse ?

On sait, grâce à des études sur plusieurs années, qu’un blé en sortie d’hiver n’a besoin que de 0,5 kg d’azote chaque jour, contre 1 kg en fin de cycle.

Alors la question qu’il faut se poser au printemps, est : est-ce qu’il y a assez d’azote disponible dans mon sol pour atteindre le prochain apport ? Si non, quelle dose a réellement besoin la plante, sachant qu’il lui faut au moins 20 kg dans le sol pour que la plante grandisse.

Comment savoir à quel moment la fertilisation est encore rentable ?

Il faut réfléchir au coût de production du blé avec un prix d’engrais assez élevé comparé avec un prix des céréales encore inconnu pour l’année prochaine. Ce sont les apports tardifs qui apportent les quelques quintaux supplémentaires et les taux de protéines nécessaires aux normes du marché. Mais est-ce intéressant économiquement de répondre aux exigences du marché ?

Nous avons, en 2022, lorsque les engrais étaient très chers, travaillé sur une grille (ci-dessous) qui permet d’estimer les quantités optimales d’engrais à apporter selon le prix du blé.

stratégie prix engrais élevé

Lorsque le prix de l’urée est à 1,20 €/kg et celui des céréales à 180 €/t, la dose optimale économiquement à apporter est celle normale. En revanche, si le prix de l’azote remonte à 1,60 €/kg, dans ce cas, l’agriculteur peut envisager une réduction de dose de 11 unités/ha. Source: Arvalis

 

stratégie prix engrais élevé

Ici, c’est le même raisonnement, mais avec une dose d’azote qui permet de produire des blés avec des taux de protéines nécessaires pour accéder au marché de l’export (avec des primes donc). Source: Arvalis

Faire des impasses, une bonne idée ?

On peut imaginer faire des impasses, mais attention, il faut plutôt la réaliser à la reprise de la végétation. Là où le blé n’a pas encore beaucoup de besoins. Les apports de sortie d’hiver sont peu efficaces donc potentiellement négligeables.

Toutefois, cette méthode est un peu risquée, notamment dans les zones où le printemps a tendance à être sec. Les agriculteurs craignent toujours de ne pas pouvoir profiter d’une météo suffisamment humide par la suite pour apporter de l’azote. Mais, en réalité, il y a toujours une fenêtre.

Faut-il réduire les doses d’engrais ?

Nous avons réalisé des essais sur trois années avec différentes modalités. L’un où nous réduisions la dose de 20 ou 40 kg/ha au premier apport, un autre au deuxième et enfin au troisième. Nous avons également réduit la dose à chaque apport.

Finalement, il n’y a pas vraiment de différence entre ces stratégies. On a simplement remarqué une baisse de 4 à 5 q/ha. Toutefois, le taux de protéines du blé était fortement impacté. Cette stratégie dépendra de la dose optimale, techniquement et économiquement déterminée.

Faut-il favoriser un type d’engrais ?

Oui, on a tendance à dire d’utiliser celui le plus efficace. C’est l’ammonitrate puisque sa forme permet de réduire les pertes par volatilisation. C’est aussi mieux pour l’environnement et les enjeux sanitaires qui en découlent.

L’urée et la solution azotée restent abordables, mais sont plus sensibles aux pertes. Un prix de vente des céréales faibles jouera en faveur de l’urée même avec une efficacité moindre.

Toutefois, nous avons remarqué qu’en moyenne, les rendements étaient de 2q/ha supérieurs lorsqu’on utilisait l’ammonitrate. À voir si ces deux quintaux supplémentaires payent le surcoût de l’engrais.

L’utilisation d’un inhibiteur d’uréase est-elle une bonne alternative ?

Ce type d’engrais est souvent vendu à un prix intermédiaire entre l’urée et l’ammonitrate et propose une performance quasi similaire à ce dernier.

D’autant que l’ammonium dont est adjuvé l’urée permet d’éviter un pic d’ammoniac et évite la volatilisation.

L’apport de biostimulants pour combler une dose plus faible, voire une impasse, une bonne stratégie ?

Nous avons beaucoup étudié les effets des biostimulants, et ce, dans de nombreux essais et sur de nombreuses années. Mais nous n’avons pour le moment pas encore pu prouver l’efficacité de ces solutions. Que ce soit par la stimulation de la plante ou du sol, les résultats ne montrent pas qu’un biostimulant compense un apport azoté.

Je pense, cependant, qu’il faut encore étudier ces produits, car nous devons surement apprendre à les utiliser. Mais aussi mieux connaître leurs modes d’action. Parfois, ils fonctionnent, souvent non, mais nous n’arrivons pas à savoir pourquoi.

Existent-ils des outils pour rendre l’engrais plus efficient ?

Oui, il y a la modulation parcellaire par exemple. Mais le plus gros levier à actionner reste les réglages des distributeurs d’engrais. C’est là où il y a une grosse marge de manœuvre afin d’épandre l’engrais de manière la plus homogène possible.

Pour cela, il faut régler les pièces qui permettent de déterminer la largeur d’ouverture, l’inclinaison selon la granulométrie ou la densité de l’apport. C’est souvent négligé, mais il y a du progrès à apporter. Chacun choisi sa stratégie quand le prix de l’engrais est élevé.

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