Allemagne – France : deux modèles agricoles face au défi des énergies renouvelables

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Allemagne – France : deux modèles agricoles face au défi des énergies renouvelables

L’Allemagne produit quatre fois plus d’énergie solaire qu’en France. Quand notre pays produit 25 giga-watt par an, l’Allemagne en produit 250. Mais qu'en est-il de l'agrivoltaïsme? (© Entraid)

L’Allemagne est l’un des premiers producteurs d’énergie renouvelables en Europe. Précurseur devenu leader en la matière, qu’en est-il des installations agricoles ? Éléments de comparaison entre nos deux pays.

Si étrange que cela puisse paraître, le déploiement de l’agrivoltaïsme en Allemagne est très en retard par rapport à la France. En effet, en 2025, l’Ademe comptabilise 1,3 gigawatt contre 14 mégawatts produits avec des installations au sol mêlant ainsi des panneaux photovoltaïques et une activité agricole rentable.

L’agrivoltaïsme peine à séduire les agriculteurs allemands

En Allemagne, les projets sont encore au stade de la recherche. « C’est un marché de niche pour les agriculteurs allemands, estime Jean Durand, chargé de mission photovoltaïque à l’Office franco-allemand pour la transition énergétique (Ofate). Si c’est une méthode intéressante pour les agriculteurs français, c’est moins le cas pour les Allemands.

En effet, en France, la disponibilité du foncier, et les démarches administratives qui en résultent, réduisent le nombre de projets photovoltaïques. L’agrivoltaïsme devient alors un levier pour déployer cette technologie. » Le chargé de mission tient tout de même à alerter sur le terme d’agrivoltaïsme qui peut être galvaudé. Et dont les différences sont très subtiles.

Agrivoltaïsme en Allemagne : le foncier en cause

Outre-Rhin, les agriculteurs sont moins attirés par cette méthode de production d’électricité, car la gestion du foncier et les règles d’urbanisme restent moins contraignantes et son accessibilité est moins complexe. D’autant qu’il est plus facile pour un Allemand de monter un projet photovoltaïque qu’à un Français. Alors pourquoi s’imposer des contraintes de productivité agricole quand on peut faire sans ?

Cette manière de produire de l’énergie, en même temps que des denrées agricoles, est assez récente que ce soit dans notre ou de l’autre côté du Rhin. Si les grands principes ont été annoncés en 2023, il aura fallu attendre deux ans pour voir le décret d’application et borner cette nouvelle manière de produire de l’énergie.

« Les principes restent les mêmes pour les deux pays, poursuit le chargé de mission. Toutefois, les seuils sont différents. Le rendement des cultures sous les canopées doit être de 90 % en France alors qu’il est de 66 % en Allemagne. » Les taux de couverture maximum sont établis à 40 % en France alors qu’il n’y en a pas en Allemagne.

Agrivoltaïsme en Allemagne : des tarifs de rachat différents

Côté tarifs de rachat de l’électricité, les mécanismes se ressemblent. « Il y a le prix de revente et des mécanismes de soutien dans les deux pays », explique Jean Durand. En Allemagne, l’électricité produite par des centrales photovoltaïques de moins de 750 kWh est régi par des contrats, tout comme en France. Les tarifs diffèrent.

Dans l’Hexagone, il est établi à 0,095 €/kWh alors qu’en Allemagne, il est de 0,056 €/kWh. Pour les installations au sol, il faut compter 0,079 €/kWh contre 0,047 €/kWh outre-Rhin. Des tarifs qui varient quasiment du simple au double. « Le tarif en France prend en compte la fiscalité, mais aussi la difficulté à mener un projet, précise Jean Durand. Tant sur la disponibilité du foncier que sur la lourdeur administrative. »

Si l’Allemagne propose de tels tarifs, c’est aussi, car la loi du marché propose davantage d’électricité que ce qui est demandé. « Cela fait 30 ans que l’Allemagne produit des énergies renouvelables », compte le chargé de mission. Le pays est en avance par rapport à la France. 13,8 % de l’énergie électrique en est issue, contre 5 % pour la France, qui mise davantage sur le nucléaire.

Les projets et centrales sont donc plus nombreux outre-Rhin. Ce qui augmente l’offre. Par ailleurs, « en photovoltaïque, on assiste à une baisse du coût des panneaux et une meilleure efficience, d’où la baisse des tarifs depuis une dizaine d’années. »

Des objectifs aux antipodes ?

L’orientation des deux pays en matière d’énergies renouvelables, notamment en photovoltaïque, n’est pas du même ordre de grandeur. Ainsi, l’Allemagne ambitionne de produire 215 gigawatts d’ici à 2030 via ces centrales solaires. Cela impliquerait un accaparement de 0,5 à 0,6 % de la SAU (avec un déploiement pour moitié au sol, moitié sur les toitures).

En France, les objectifs ne sont pas marqués, mais la programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit une production entre 54 et 60 gigawatts d’ici à trois ans, soit l’équivalent de 0,06 % voire 0,1 % de la SAU. En Allemagne, les surfaces agricoles couvertes à cet effet ne doivent, au total, pas dépasser les 80 gigawatts.

La France ne s’étant pas mis de barrière. Toutefois, il reste difficile d’estimer la production d’énergie solaire potentielle tant les conditions pédoclimatiques et le type d’installations font varier leur productivité.

Pourquoi ce sujet de l’agrivoltaïsme en Allemagne ?

Véritable sujet qui traverse la plaine en ce début d’année, l’agrivoltaïsme en France fait son entrée et provoque avec elle une multitude de questions. Mais qu’en est-il de l’autre côté de la frontière ? Là où les énergies renouvelables sont reines, et ce, depuis longtemps ? Traversons le Rhin.

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